Extrait du journal

Heureusement, la science s’est mise de la partie. Un ingénieur allemand vient de cons truire un cheval de théâtre tout à fait réussi : • Il a l’air d’être en vie, dit un de nos confrè res, qui sans doute l’a vu ; il marche à toutes les allures, grâce à des machines que peut ai sément diriger le cavalier. Il se bat les flancs de sa queue. Il dresse les oreilles. Il remue les yeux. Il respire, il s’ébroue, et la vapeur sort de ses naseaux. Il hennit. Il est solide, infati gable, garanti pendant plusieurs années,comme une montre. • Comme couronnement de toutes ces qualités, notre confrère a soin de faire ressortir le mérite suprême du cheval en question, à savoir son incomparable sobriété. Il n’ajoute pas — mais le sous-entendu se devine — que cette sobriété même met le théâtre à l’abri des souillures que lui infligeaient trop souvent les... artistes man geurs d’avoine qu’il a remplacés dans leur emploi. Le seul défaut du nouveau « cheval de théâtre » est de coûter 12,500 francs. Avec cette somme, on peut acheter pas mal de fou’vage. Mais si l’on pouvait fabriquer au même prix des ténors qui ne mangeraient pas, ça ne serait pas trop cher I — P. G....