Extrait du journal

On n’est pas journaliste depuis quarante ans sans avoir vu bien des choses; mais quand on a beaucoup vu et retenu tant qu’on a pu, on s’aperçoit qu’on ignore bien des choses encore, et qu’en fin de compte toute la science qu’on a acquise par l’exercice de son métier, jointe à celle qu’on avait pu acquérir par ses études préalables, est encore une science infime et lamentablement incomplète, tant la som me des choses qu’on ignore est sui>érieure à la somme des choses que l’on connaît. Moi qui vous parle, moi qui me donne les gants de répondre aux questions qu’on me pose, comme si j’étais imbu de toutes les sciences connues et de quelques autres encore, je me surprends bien souvent à de meurer coi et en flagrant délit d’ignorance. Parfois même, je n’ai point l’esprit de me taire, et je me prononce avec aplomb sur des questions que j’ai peu ou mal étudiées, si bien qu’il m’arrive d’être fait quinaud par un ou plusieurs de mes lecteurs, plus calés que moi dans la matière. Ce sont là de petites mésaventures pro fessionnelles dont il faut $e hâter de rire, de peur d’être obligé d’en pleurer, comme a dit Figaro. La Sagesse des nations pré tend que seul celui qui ne fait rien ne fait...