Extrait du journal
| ils su sont tous prononcés en faveur du maintien uu , la censure avec une netteté qui ne laisse place à aucune équivoque. La censure est considérée par eux comme la meilleure sauvegarde de la dignité de l’artiste. Les directeurs de théâtre, pour des rai sons un peu di fié rentes, estiment que l'institution de la censure, bien loin d’être uns entrave pour leur industrie, est un bienfait précieux. Et quand on les pousse un peu, quelles raisons font valoir les hommes de théâtre à l’appui de leur opinion ? Eli ! oui, ces bons vieux arguments, re battus sans doute, et qui montrent la corde, mais tout aussi décisifs que par le passé : la nécessité pour le législateur d’écarter du la scène les peintu res trop libres, les appels à la révolte sociale. Voilà ce que M. Turquet a répété devant la commission du budget. U n’a pas cherché à parler pour la gale rie, à être brillant ou spirituel ; il a fait entendre la voix de la raison et du bon sens : la commission a fait la sourde oreille. l!n des arguments qui ont paru impressionner le plus vivement les membres de la commission est le suivant : « Depuis 1870, il n'y a eu que six pièces interdites par la censure ! > et l’on part de là pour conclure à l'inutilité de l’ins titution. Nous ferons remarquer tout d’abord que si un nombre aussi restreint d’œuvres ont mérité d’att.rer les foudres de la censure, c’est précisément a l'influence bienfaisante de l’institution qu’il faut l’attribuer. La crainte salutaire de lu répression n’a pas été étrangère, il est permis de le croire, à la réserve de nos auteurs dramatiques. Mais ce n’est là qu’un sophisme aisé à réfuter, et il convient de voir les choses d’un peu plus près. Au nombre des pièces interdites par la censure, nous en trouvons deux signées de noms tll ustres : une pièce patriotique, de MM. Erckmann-Chatrian.et Germinal, tiré du roman d’Emile Zola. La pièce de MM. Erckmann-Chatrian. imprégnée sans doute d’un souffle ardent d; patriotisme, faisait étalage à l’égard de nos vainqueurs de sentiments que nous comprenons, mais qu'il était imprudent, dangereux de laisser traduire sur la scène au lendemain des événements de 1870-1871. L’Allemagne n’eùt pas manqué de nous demander des explications, et dans l’impuissance de donner à l’affaire une autre solution, le ministre des affaires étrangères se serait vu obligé de faire présenter ses excuses par notre ambassadeur à Berlin. Les adversaires de la censure veulent-ils nous exposer de gaîté de cœur à des incidents de cette nature? La question de Germinal, autour de laquelle il a été fait un grand bruit, est encore plus simple. Le gouvernement estimait que les appels violents à la haine sociale, à la guerre civile, lancés par les ac teurs du drame, la peinture des scènes de la grève, pouvaient constituer un danger pour la paix publi que. il a interdit la pièce, comme c’était son droit et même son devoir, puisqu’il a la responsabilité de l’ordre dans la rue. M. Zola s'est indigné, a pro testé à la face du pays indifférent. Il est demeuré à peu près seul de son avis : < Moi seul, et c'est as sez ! » s’est écrié l'auteur de Germinal. Est-il besoin d’insister sur les abus qu’entraîne rait la suppression de la censure au point de vue de la moralité. Certes, les pièces qu’on joue dans nos théâtres de genre n’ont rien de bien chaste. Qu’on mesure uu instant le degre d’obscénité auquel ne tarderaient pas à descendre les auteurs des opé rettes et chansonnettes de café-concert ? M. Turquet a lu devant la commission quelques spécimens de chansonnettes refusées par la censure : c’est le com ble de l’obscénité. Les membres de la commission du budget n’ont pas paru convaincus : il paraît qu’il n’y avait pas parmi eux de pères de famille. La censure n’a jamais étouffé les chefs-d’œuvre : la suppression de la censure n’en ferait pas naître ,...
À propos
Au début simple déclinaison à prix modique du journal La Gironde, La Petite Gironde devient de plus en plus autonome à la fin des années 1880, lorsque sa diffusion dépasse – et de très loin – celle de son vaisseau-mère pour atteindre les 200 000 exemplaires à l'orée de 1914. Centriste modérée à l'origine, sa ligne éditorialse se droitise au fil des ans, jusqu'à devenir proche de celle de L'Action française dans l'agitation de la Première Guerre mondiale. Sans surprise, le journal sera collaborationniste en 1940, puis interdit en août 1944.
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