Extrait du journal
L.A SAINTE AU CANON C’était hier la Sainte-Barbe. Ce jour là, les artilleurs ne nettoient pas leurs canons à la caserne, ils les rincent chez... le mar chand de vins. Inutile d'ajouter qu’ils se soucient de sainte Barbe comme de leur première chemise. C’est que la sainte date de plus loin encore... de l’an 235, époque à laquelle cette pauvre malheureuse fut décapitée par son père, infâme païen, qui du reste, affirme la légende, tomba aussitôt frappé de la foudre. La foudre et le canon, c'est de la même famille. Voilà pourquoi sainte Barbe fut spécialement af fectée à l’artillerie. Du ciel oil elle s’exerce au tir du tonnerre, sainte Barbe continue à intervenir bruyamment dans nos petites affaires terrestres. Interrogez en effet sur elle une brave femme d’Auvergne, et elle vous af firmera avec terreur que la sainte dirige sa foudre contre les femmes qui font leur lessive le diman che. Le curé qui a trouvé le premier cette histoire-là et qui l’a imposée à ses dévotes a bien dû en rire tout seul. XX LA MÉFIANCE RÈGNE Décidément, l’année ne s’annonce pas brillante pour le prophète Elie, autrement dit docteur Dowie. La grande croisade qu’il avait entreprise à New-York n’a pas donné les résultats qu’il es comptait au point de vue religieux... et surtout au point de vue financier. Et alors que les fidèles s’éclipsent, les créanciers se montrent et deviennent exigeants. C’est ainsi que la Cour fédérale de Chicago vient de mettre sous séquestre la ville de Lion-City for mée par le docteur Dowie et ses adeptes ; deux liquidateurs ont été nommés. Cette formidable liquidation a bien quelque chose d’américain. 11 y a du reste des chances pour qu’elle n’ait pas lieu, les créanciers ne réclamant que quelques mil liers de francs, alors que le vaste phalanstère qui compose Lion-City est estimé de ioo à i5o mil lions. Et puis un prophète a beau être usé, il garde toujours assez d’influence, et surtout il reste assez d’imbéciles pour que la religion qu’il affiche lui serve à mettre un peu d’ordre dans ses finances. XX LES TUILERIES ÉCLAIRÉES C’est aujourd’hui que commencent les travaux pour l’éclairage des Tuileries. S’inspirant des lignes tracées par Le Nôtre pour ses « carrés » de verdure et de fleurs et ses quin conces d’arbres, M. Redon a décidé de placer les lampes électriques selon une symétrie qui s’har monisât avec le dessin général du jardin. Ce plan ainsi remanié comporte, comme l’an cien, 66 lampes à arc, mais d’un nouveau modèle, dessiné par M. Redon, et qui seront disposées de la façon suivante : ao dans la grande allée centrale et placées contre les massifs d’arbres à distance égale les unes des autres, n dans l’allée des Oran gers, n dans l’allée en contrebas de la terrasse du bord de l’eau, 4 sur la terrasse de l’Orangerie, 4 sur la terrasse du Jeu de Paume, 6 dans l’allée reliant la rue de Castiglione au pont de Solférino, 10 enfin au milieu des allées secondaires. Les travaux seront terminés en un mois. XX HISTOIRE D’OREILLE Nous avons déjà raconté comment un docteur américain avait pris à un courageux spéculateur une oreille pour l'appliquer à un millionnaire qui aurait perdu la sienne. Ce spéculateur original a encaissé ses 25,000 francs. La greffe humaine, exécutée par le docteur Andrew Leider, a parfaitement réussi. Le million naire anonyme a déjà quitté la maison de santé de Philadelphie, où le transport a été exécuté. Le vendeur ne sortira que samedi de la maison de santé, parce qu’alors la plaie sera tout à fait cicatrisée. Il compte établir un nouveau restaurant. Quelques-uns de ses amis lui conseillent, au lieu de garder l’anonyme, d’adopter l’enseigne : «A l’o reille d’or. » Quant au millionnaire, personne ne connaîtra son nom. Le docteur Leider va publier un récit complet de l’opération qui excite vivement la cu riosité publique. XX CONTRE LES BRONCHITBS Lee employés de banque se plaignent. Le séjour à l’intérieur de la Bourse, où seuls les agents de change ont le droit d’opérer, leur est in terdit, et ils sont obligés de se tenir sous le péri style du monument public et même sur l’escalier, ils sont donc exposés aux courants d’air et aux in tempéries. Les employés sont las de cet état de choses. Ils avaient un moment espéré que la Bourse leur de viendrait hospitalière après les agrandissements, mais ils ont, paraît-il, perdu tout espoir à ce su jet. Alors, ils se tournent vers les pouvoirs publics et leur syndicat vient d’adresser au ministre des finances une pétition pour qu’il leur accorde un « permis de séjour » à l’intérieur de la Bourse. Une copie de cette pétition a été adressée à M. Combes, président du conseil. XX LES LETTRES ET LES ARTS Au musée du Louvre, on vient de commencer les travaux de la construction de l’escalier qui con duira à la collection Thomy-Thiéry. Le musée subviendra à cette dépense sur ses propres deniers. En effet, nos musées, depuis la loi du 16 avril 1895, ont une personnalité civile qui leur permet de recevoir des dons et des legs en espèces. Dès lors, ils se trouvent à la tête d’un budget qui cha que année s'augmentera des dons, du produit de certaines ventes et des subventions non employées, Si l’administration rate certains achats, elle sera maintenant sans excuse....
À propos
La Petite République française – puis socialiste de 1898 à 1905 – fut une feuille républicaine à cinq centimes lancée en 1876 qui connut un succès relatif dans les premières années de la Troisième République. Satellite de La République française de Gambetta, les deux publications deviennent indépendantes en 1878 avant que la diffusion du journal ne s’amenuise à la mort de ce dernier en 1882.
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