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La Petite République, 11 novembre 1904

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La Petite République
11 novembre 1904


Extrait du journal

A propos de bottes. — L’agent-Centaure. Ce que l’on trouverait en étudiant les effectifs. — Vieilles habitudes et bonnes occasions. — Tout finit par des chansons Voilà qui paraît à moitié décidé : Paris possédera bientôt une centaine d’agents à cheval. On va discuter sur leur utilité. Mais d’ores et déjà les conseillers muni cipaux qui ont étudié la police européenne, affirment que dans les grandes villes qui possèdent des brigades montées, on n’a qu’à se louer de leur intervention. C’e%t ainsi qu’à Londres, lors du jubilé de la reine, qui réunit en certains endroits les foules les plus compactes qui se puissent rêver, les policemcn à cheval fi rent merveille. Il en fut ainsi à Berlin dans maintes occasions. Dans cette dernière ville les agents mon tés présentent môme un avantage tout par ticulier. Lorsque l’empereur doit passer, ils tournent tous du côté d’où il vient la tête de leur cheval, renseignant ainsi, sans le vouloir, les malins sur l’itinéraire impé rial. Il a paru qu’après Londres et Berlin, Paris se devait d’avoir aussi ses agents à cheval. La question, à la fois curieuse et amu sante, valait quelques discrètes interviews. Quel sera l’Insigne ? C’était le cas ou jamais de rendre une visite sympathique à mon petit employé de la préfecture. Je le trouvai toujours aussi alerte et aussi accueillant, avec seulement une lé gère mèche blanche qui s’accentuait sur la tempe gauche, certifiant que le brave homme avait encore trop travaillé le soir à la lumière fatigante du gaz. Aussitôt que je lui eus expliqué l’objet de ma visite, il partit d’un bon petit rire s — Ainsi, me dit-il, vous venez me voir à propos de bottes. — A propos de bottes ? répétai-je éton né. — Evidemment. « Ah ! vous autres journalistes, vous ne voyez pas plus loin que le bout de votre plume. Comment ! vous n’avez pas deviné que si l’on donne à certains agents des che vaux, c’est pour utiliser les vieilles bottes qui s’abîment dans les magasins ! — J’avoue que je n’y avais pas songé. — Mais dans l’administration, il n’en est jamais autrement. C’est l’objet qui crée la fonction. « Le meilleur moyen, le plus logique, d’utiliser des boites n’est-il pas encore de monter à cheval ? » Je regardai attentivement mon petit em ployé, craignant qu’il ne s’amusât à mes dépens. Son sourire respirait le contentement, non la moquerie. — Maintenant, dans les bureaux, ajoulal-il, le problème à trouver est le nouvel in signe de cette brigade à cheval. « Il y a déjà le char poui les agents affec tés au service des voitures, l’ancre pour les agents plongeurs, la bicyclette pour les agents cyclistes, que va-t-on bien pouvoir trouver pour les futurs agents à cheval ? » J’esquissai un geste d’ignorance et d’in certitude. — Moi, j’ai trouvé cet insigne, me dit le petit employé, non sans une certaine fierté. « C’est à la fois visible et décoratif. Tout simplement, inscrit sur la tunique et la ca pote de l’agent à cheval le nombre cent, en chiffres dorés. « Cent en or, vous comprenez ? — Pas précisément. — Centaure ! agent à cheval, centaure ! Et mon petit employé, manifestant une grande joie, donna des grands coups sur sa table et sur son fauteuil. Je le félicitai vivement, me souvenant qu’il avait la spécialité des jeux de mots auxquels il appliquait tout l’esprit que lui laissaient les tranquilles besognes de l’ad ministration. Curieuse explication — Mais soyons sérieux, ajouta-t-il tout à coup, comme s’il prenait conscience de la gravité de la question. « Il est une raison des plus graves qui explique la faveur dont semble jouir à la préfecture ce projet de police à cheval. « C’est qu’on y voit un moyen de multi plier la police sans pour cela être obligé d’augmenter le nombre des agents. « Un agent à cheval pourra, si j’ose m’exprimer ainsi, se trouver dans de très nombreux endroits à la fois. « Et ainsi, peut-être, le nombre des atta ques nocturnes cl des exploits d’apachcs diminuera-t-il sensiblement. « Car voyez-vous, me confia le brave homme sur un ton de confidence, personne n’a encore donné la vraie raison de la mul tiplication de ces attaques à Paris. C’est que l’administration, depuis quelques an nées, s’est surtout préoccupée de créer des sinécures dans le domaine de la police, se souciant peu que le budget soit surtout em ployé à mettre quelques heureux dans de bons fromages, au lieu de rétribuer les petits agents. Et ccs derniers ont diminué dans une progression effrayante. « Ah ! sr l’on avait la curiosité de dresser avec exactitude les effectifs ! » Et le petit employé me reconduisit pres que contrarié de m’en avoir trop dit. Il ne cessait de me répéter : « Surtout, ceci, en tre nous. » Un homme prévoyant Par curiosité je questionnai sur celte même réforme équestre un agent de mon quartier qui n’a vraiment pas l’air d’un mauvais bougre. — Vous savez qu’on va créer une brigade d’agents à cheval ? — Je sais, me dit-il d’un air entendu, mais je n’en serai pas. J’ai les fesses,, nickelées....

À propos

La Petite République française – puis socialiste de 1898 à 1905 – fut une feuille républicaine à cinq centimes lancée en 1876 qui connut un succès relatif dans les premières années de la Troisième République. Satellite de La République française de Gambetta, les deux publications deviennent indépendantes en 1878 avant que la diffusion du journal ne s’amenuise à la mort de ce dernier en 1882.

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