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La Petite République, 11 novembre 1906

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La Petite République
11 novembre 1906


Extrait du journal

Ce que pense l’inspecteur général des pêches maritimes, de la détresse des pêcheurs et quels remèdes il propose d’y apporter. La tempête a dispersé les dernières bar ques qui tentaient encore la fortune. Ja mais, dans cette période douloureuse qui dure depuis cinq ans, la misère 11’aura été aussi grande sur les eûtes de Bretagne. Ceux qui reviennent du pays en parlent avec épouvante. Ils se demandent ce que sera l'hiver dans les familles de ceux qui vivent de la sardine, des pécheurs comme dos soudeurs-boîtiers. Celle année, on a pêché à peine quel ques milliers de sardines du côté des Glénans. Le poisson n'eut pas plutôt fait une tardive apparition vers septembre que la tempête s'est déchaînée ; et la flottille des petites barques dut déployer scs grandes ailes rouges et rentrer précipitamment dans ses ports ; elle laissait derrière elle plusieurs victimes. Un sait par les dépêches quotidiennes ce qu'il advient de ceux qui osent retourner sur le champ de pêche jeter leurs filets : ils sont engloutis. Et nous sommes au mois où ta sardine quitte nos côtes pour ne remonter qu'en mai prochain. 11 y eut en 1902 ce qu’on appelle un beau mouvement de pitié, ll.se traduisit par des souscriptions publiques et on fit de la ! charité. Ce ne fut même pas un palliatif. ' Depuis, la sardine n’est pas revenue, ta misère n'a lait que grandir et elle est cette année à son maximum. Le peu qui a été pêché n’a pas remboursé les appâts ni r l’usure des filets et de la barque, il n’a pas , été distribué de parts entre pêcheurs. V a-t-il quelque chose à faire ? Nous sommes allé le demander à l’inspecteur • général des pèches maritimes, à l’un de 1 ceux qui cette année se feront entendre à | l'Institut océanographique de Paris, à M. • Fabre-Doumergue. 11 revient précisément j des côtes bretonnes. — Si l’on remonte, nous dit-il, le cours j des années on constate que la misère est,en | somme, rythmique en Bretagne. Tous les dix ans environ, la sardine quitte les côtes et à ces dix bonnes années succèdent quel ques mauvaises années. « Où va la sardine, on l’ignore. Ces bancs de plusieurs kilomètres qui com prennent des milliards d’individus dispa raissent sans que l’on sache où ils vont. Tout ce que l’on sait sur les mœurs de ce poisson, c'est qu’il ne se plaît que dans des courants dont la température est rela tivement chaude et où ils trouvent le plankton, animalcule microscopique qui sc nourrit lui-même de végétaux infiniment petits qui se plaisent à cette température. « Lorsque les courants chauds s’éloi gnent, la sardine à la recherche de sa nourriture s’éloigne avec eux. Et on aura beau jeter de l’arachide ou de la rogue dont elle se montre friande aux endroits qu’elle vient de quitter, aucune sardine ne lèvera. — Mais alors, il suffit de connaître les courants et suivre la sardine ? — Oh ! mais d’abord nos pêcheurs cl nos marins ne connaissent rien des courants qui se trouvent dans le voisinage de nos côtes. U faut pour arriver à leur connais sance des observations longues et minu tieuses. Les influences qui agissent sur eux sont, d’ailleurs, multiples. « Il y a à Copenhague un bureau qui centralise ces observations pour la mer du Nord, telles qu elles sont recueillies par les marins anglais, allemands, danois, Scandinaves et il publie un Bulletin d'oc casion chaque fois qu'il y a un fait inté ressant pour la pêche ou la navigation. « La France n’ayant encore rien fait dans cet ordre d'idées, nous 11c savons rien sur la sardine qui ne remonte pas plus haut qu'à mi-chemin de la Manche. J’ai imaginé un thermomètre en bois, d’usage par conséquent commode pour les pêcheurs et à très bas prix, qui permettra ; de connaître la température jusqu’à 100 mètres de fond. O11 va donc pouvoir s’oc cuper de l'étude des courants. « Mais il ne faut pas songer avec les moyens actuels des pêcheurs à suivre la sardine au large si les courants l’y ont en traînée. Les faibles barques d’aujourd'hui ne peuvent se risquer à plusieurs jours en mer et les bateaux pontés ne sont pas propres à la pèche de la sardine. « Il faut une autre organisation. Le ba teau ponté armé pour le thon doit être doublé de la barque ordinaire que l'on utilise aussitôt que la sardine est levée. Et comme l’on se trouve à une grande dis tance des côtes, et que ce poisson s’abîme en peu de temps, il faut des vapeurs ra pides qui l’amènent au port. « Cela nécessite tout un plan de tra vaux d’aménagement des criques breton nes qui ne sont ni assez sûres i>* assez profondes. Si l’on veut prévenir le retour de ces périodes de famine, il faut s'atteler dès aujourd'hui à cette élude et 11e pas attendra >6 retour des bonnes années oui...

À propos

La Petite République française – puis socialiste de 1898 à 1905 – fut une feuille républicaine à cinq centimes lancée en 1876 qui connut un succès relatif dans les premières années de la Troisième République. Satellite de La République française de Gambetta, les deux publications deviennent indépendantes en 1878 avant que la diffusion du journal ne s’amenuise à la mort de ce dernier en 1882.

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