Extrait du journal

Un de nos lecteurs, qui a occupé des postes diplomatiques importants, nous adresse les réflexions suivantes que nous reproduisons avec plaisir : Si l'on a reproché à Emile Ollivier son fameux « cœur léger » de 1870, il iaut conve nir que le « cœur léger » politique de la France ne s'est guère amélioré depuis l'An née terrible. Pour s'en convaincre, il suffirait de se rappeler nos nombreuses et inutiles crises ministérielles, et la fièvre, pour ainsi dire chronique, avec laquelle nos députés défont, sans motifs sérieux, ce qu'ils ont fait la veille. Ainsi, pourquoi a-t-on renversé le cabinet qui, dernièrement encore, était sou tenu par une telle majorité ? Ceux-là mêmes qui ont obtenu ce beau ré sultat seraient sans doute fort embarrassés pour expliquer leurs votes, mais il y a une question, pourtant, qui devrait ouvrir les yeux aux moins clairvoyants, c'est l'effet dé plorable produit en Europe par ces inter mittences parlementaires. Nous ne parlons pas de l'Allemagne, qui est notre ennemi héréditaire et dont la presse n'écrit pas un mot qui ne soit inspiré par le chancelier de i'Empire ou par l'empereur, lui-même, mais de la presse des autres pays, qui est una nime à nous condamner, à commencer par la presse russe, qui, tout entière, déplore notre lièvre de changement. Or, ne l'oublions pas, le cabinet de Berlin a pour tradition de nous détruire morale ment, avant de nous attaquer matérielle ment, et c'est même un mauvais signe que cette campagne de dénigrations et de men songes perfides ait déjà commencé contre nous. On a arrêté les journaux allemands à la frontière, comme on faisait sous l'Empire, mais cette politique du silence n'empêclie pas l'œuvre de dénigrement de se faire, et il serait, enfin, temps de prouver, a nos amis comme à nos ennemis, que nous savons bien ce que nous voulons et que nous ne fai sons plus de politique d'un « cœur léger », mais bien avec la raison d'une déu.jciatie sage, pacifique et progressive....