Extrait du journal
décoré , et que pour recevoir le serment, il ait mérité d’être le chef de cette institution. La liste nominative de ceux qui doivent obtenir la décoration de juillet, et que la fureur du quolibet, si générale à Paris, a déjà fait surnommer les chevaliers des barricades, cette liste s’élève à 102.8 personnes. Ce n’est pas beaucoup pour un si grand événe ment, et mieux peut-être aurait valu ne pas montrer officielle ment que si peu de gens avaient bien mérité de la patrie dans cette circonstance. Mais ce qui est tout-à-fait singulier, c’est que les qualités des futurs décorés ne sont pas énoncées à la suite de leurs noms. C’est la première fois, sans doute, qu’uu pareil si lence a été gardé dans une pareille occasion. Quels peuvent être les motifs de cette réticence qu’on ne peut prendre pour un ou bli. Y a-t-il donc quelque raison de politique ou de convenance à ne pas publier les titres, qualités et professions des vainqueurs? Craint-on d humilier l’orgueil de quelques-uns ou d’exalter la va nité de quelques autres , en faisant voir les distances sociale1» qui séparent des citoyens réunis et confondus maintenant dans une glorieuse égalité par le même signe symbolique dc fraternité? Le public n aurait pas été fâché peut-être de savoir à qui les hom mages de sa reconnaissance devaient être adressés. Et. voila en effet qu aujourd’hui un journal annonce qu’un des individus compris dans la liste des croisés . et que ee journal nomme, a été jadis décoré d’un autre ordre à fleurs de lys qui ne sç porte pas sur la poitrine. Quoi qu’il en soit de ces étranges circonstances, nous ne nous en occuperons pas davantage. Ce sont en quelque sorte des affaires de famille qui 11e touchent en rien aux intérêts généraux et qui peuvent se passer de nos louan ges comme de nos critiques. Mais ce qui mérite plus d’attention, c’est la position dans la quelle ces circonstances ont placé le gouvernement vis-à-vis des hommes de juillet. Ceux-ci se sont réunis au nombre de plus de mille, grande majorité des décorés , et là , dans une séance avec président, vice-président et secrétaire, après avoir lu, au milieu des plus vifs applaudisscmens, plusieurs articles du National, du Courrier et du I emps, il a été décidé à Y unanimité : i° Que le roi, comme représentant de la nation, peut remet tre aux décorés de juillet, qui alors la recevraient de sa main , 1 étoile qu’ils doivent porter ; mais que rien ne l’autorise à là donner en son nom ; 20 Que ces mots : donné par le Roi. changeraient la nature de la récompense qui cesserait d etre une récompense nationale pour devenir une faveur royale; r 3° Que les faits, à raison desquels la décoration a été instituée sont antérieurs à I existence même du gouvernement du roi : 4° Que le seul serment à exiger, en ce cas. serait celui de fidé lité aux principes qui ont mis les armes à la main et valu la dé coration nationale. En conséquence de cette déclaration . les membres présens se sont engages a 11e pas se soumettre a la condition du serment et à porter immédiatement la décoration spéciale déterminée par la commission. Et en effet, un M. Décombis, ancien vainqueur de la Bastille et nouveau vainqueur du 29 juillet, a été amené et a distribué luimême le ruban de la décoration, mais par parcelles seulement; attendu que les fabricans n en ont encore livrés que très-peu au Ainsi, l’ordonnance du 5o avril est, par le fait . considérée comme non avenue, et les hommes du 29 juillet veulent se main tenir indépendant de la royauté du 7 août. C’est là une des plus complètes manifestations d’anarchie qui se soient encore présen tées, et à ne raisonner que par les principes de la révolution , ce 11e sont pas les vainqueurs des barricades qui sont inconséquens. Le gouvernement du 7 août est, sans contredit, sorti du mou vement de juillet. C est la son origine et son principe. Il a senti, cependant, que s’il en suivait les conséquences, il entrait dans une voie de mesures et de faits qui tendraient à coinproiiieffrc son existence. 11 a voulu s en éloigner, et les hommes et les choses de >a première élévation sont alors devenus les objets appareils de sa 1 épugnance. Le \oila donc essayant de marcher contre sa nature. Cependant il ne saurait se passer des principes et des moyens de » la popularité ; car. eux seuls sont encore toute sa force; mais quand il veut se rapprocher d’eux par des actes ou des faveurs. il e.i est, a son tour , repoussé par cet instinct des partis qui comprennent parfaitement ce qui est ou non en sympathie sincère avec eux. De telle sorte que le gouvernement est‘obligé, ou d’aller avec des hommes et des principes dont il ne voudrait pas, ou de repousser des principes et des hommes auxquels il doit tout. C’est celle posi tion si contradictoire et que chaque mesure vient manifester, qui nous a fait dire si souvent qu’il y a une espèce d’impossibilité aux affaires publiques, de marcher dans les intérêts du pays an milieu de contradictions si sérieuses et si fondamentales. Ajoutons à cela que des souscriptions ont été ouvertes et com blées, pour remplacer la solde de tous les agens militaires ou civils mis hors de service par le gouvernement, pour le fait des associa tions dites nationales. Comment M. Casimir-Périer espère-t-il sor tir de ces inextricables embarras? Commenta-t-il pu se jeter au mi lieu d’une confusion si complète; et qu’il vient d’augmenter luimême à propos des récompenses nationales, et du serment qu’il a fait exiger? C’est qu’encorê une lois, il est des positions politiques où il est impossible de bien faire, où il est impossible de ne pas commettre de fautes , quoiqu’on fasse , où il est impossible se maintenir, et le temps apprendra à chacun si telle est, eu effet, la position dans laquelle le gouvernement se trouve placé....
À propos
Publié d’abord sous le nom La Quotidienne en 1792, ce journal royaliste est l’organe principal de Joseph-François Michaud. Historien des croisades, ce dernier est d'abord républicain, puis devient royaliste par hostilité à la Convention. Ces revirements firent changer le journal de nom plusieurs fois durant la Révolution, l’Empire et la Restauration avant de retrouver, en 1814, son titre initial. En 1815, le journal devient la Feuille du jour.
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