Extrait du journal
s’en est jamais offert peut-être une preuve plus convaincante, cf i. la fois plus triste. Jusqu’à quel point la France est-elle donc tom bée, qu’on puisse se jouer ainsi de son bon sens et de ses desti nées? Est-elle donc devenue si sotte, si folle ? A-t-elle oublié s» langue nationale ? Les partisans du juste milieu nous diront-ils le terme moyen entre oui et non? « Il n’y a nul prétexte à l’état de siège dans l’Ouest, » assure M. Casimir Périer ; et la conclusion de cette proposition, c’est d’envoyer en Bretagne un commissaire extraordinaire avec use blanc-seing qui met à sa disposition arbitraire toutes les autoiités^ tous les moyens d’exécution ! « Il n’y a nul prétexte à l’état de siège » , et des colonnes mo biles appuyant, sans aucun doute , de nouvelles visites domici liaires vont se diriger sur tous les points, en dédaignant les formes conservatrices des lois ordinaires ! Qu’est-ce donc que Y état de siège , sinon la suspension du ré gime habituel de la justice et de l’administration, sinon l’emploi/ de la force militaire et sa substitution aux moyens réguliers et. communs ? Point de sophisme du moins. Nous ne vous demandons ni jus tice, ni action mesurée des lois, ni répression convenable des dé sordres partiels. Vous avez le désir de tout cela peut-être, et ne pouvez le réaliser, parce que votre principe vous conduit inces samment au désordre, à l’absurde, à l’impossible. Vous ne pouver gouverner que par la force dont vous vous êtes emparée, à défaut de la logique, qui est contre vous. Nous comprenons cette position? et nous nous y soumettons tant que vous pourrez la faire durer. Mais, encore une fois, pas de sophismes ! Vous voulez mettre une partie de la Bretagne en état de siège? dites : nous mettons la Bre tagne en étét de siège; mais ne venez pas, insultant tout à la fois au bon sens, à la force des choses et des mots, faire usage de quel ques mauvais artifices de style, de quelques déceptions mal pré sentées dans les idées et dans les paroles , pour essayer de faire des dupes, et chercher à faire croire que vous ne sortez oas de l’action régulière du pouvoir, lorsque, par le fait, vous mettez toute une province hors de la loi et du droit commun. Qwi comptez-vous tromper? La Bretagne? elle aura mieux que personne à s’apercevoir bien tôt peut-être de ce que c’est qu’un état de siège que l’on n’ose pæ ouvertement déclarer un état de siège. La France? nous vous le demandons encore. Croyez-vous donc qu’elle ait oublié jusqu’à sa langue nationale? Un commissaire ex traordinaire réunissant tous les pouvoirs, avec colonnes mobiles et le reste , lui semblera toujours un chef militaire, agissant sur une localité déclarée en état de siège. L’Europe ? mille échos lui apprendront ce qu’un rapport et nue conclusion contradictoires cherchent en vain à lui dérober. Mais enfin vous y voilà. Vainement tous les documens publiés par les journaux ne présentent-ils les agitations de la Bretagne que comme des mouvemens de peu d’importance , des oppositions sans ramifications, des promenades militaires, contraires aux lois sans doute, mais que, jusqu’ici, les lois dans tous les temps, hors ceux de la révolution, avaient suffi pour réprimer ou pour contenir. En présence d’un tel état de choses, que le temps aurait pu seul cal mer et modifier, que peut produire sur l’esprit de la province le déploiement du pouvoir confié au commissaire extraordinaire? La terreur ou la révolte. Si la guerre civile suivait l’usage de" ces moyens, qui faudrait-il en accuser ? Il 11e manquerait plus que de nous accuser de l’avoir provoquée ! .•<— O11 n’a que trop de raison de le craindre, comme on va pouvoir en juger par ces réflexions que veut bien nous communiquer une personne que sa position a mis à même de bien connaître l’esprit et la situation de ces nobles contrées. » Depuis plusieurs mois les déclamations des journaux de la révolution et même du gouvernement sont dirigées contre les dé partement de l’Ouest ; chaque jour l’on publie contre eux des ca lomnies odieuses. Un jour, \es chouans se sont portés aux excès les plus barbares envers des gendarmes ou des soldats; aux uns , ils ont arraché les yeux et le nez, ils ont mutilé les autres, dispersé sur les grandes routes les lambeaux de leurs cadavres. Enfin, il n’est sorte de contes à la Barbe bleue que le gouvernement ne tolère dans ses journaux et dont il 11e cherche les héros dans les pauvres réfractaires de l’Ouest. "Un jour ils ont détroussé des voyageurs; mais quelles preuves en donnera-t-on, tandis qu’il est positif que les réfractaires n’ont enlevé nulle part que des armes • tandis que toutes les transactions opérées dans les foires, où ils n’ont cessé de se rendre comme à l’or dinaire, ont été exécutées avec la même loyauté, bien que souvent elles fussent passées avec des patriotes, et que le seul engagement fut une poignée de mains, selon l’usage. » Les patriotes parisiens, qui flétrissent du nom de brigands des hommes qui ne cherchent que des armes pour se tenir en garde contre les menaces du gouvernement, ont-ils donc la conscience si pure?... Les musées, les châteaux royaux , les casernes , Alger même, où l’on a été forcé de fusiller plusieurs de ces héros de juil let, répondent-ils et ne vengent-ils pas les royalistes des calomnies qu’on déverse sur eux. » Il y a évidemment du machiavélisme dans ces récits menson gers. Les révolutionnaires de ces départemens, presque tous habitans des villes et acquéreurs des biens nationaux , voudraient engager le gouvernement dans une croisade jacobine contre les habitans des campagnes. Le ministère, de son côté, ne serait peut-être pas fâché d’avoir un prétexte d’y réunir des troupes et de retirer des régimens des frontières du nord où il re Joute tou-...
À propos
Publié d’abord sous le nom La Quotidienne en 1792, ce journal royaliste est l’organe principal de Joseph-François Michaud. Historien des croisades, ce dernier est d'abord républicain, puis devient royaliste par hostilité à la Convention. Ces revirements firent changer le journal de nom plusieurs fois durant la Révolution, l’Empire et la Restauration avant de retrouver, en 1814, son titre initial. En 1815, le journal devient la Feuille du jour.
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