Extrait du journal
Du fond de l’horizon accourt avec furie Le plus terrible des en fa us Que le Nord eut portés jusque-là dans ses flancs. Cette mer si douce à parcourir, c’était cette littérature de nouvelles, con- j tes, romans, drames, fantaisies, revues , que tout le monde sillonnait sans j travail ou du moins sans conscience , sans souci, sans prévoyance, et qui, j depuis cinq ou six ans, n’offrait à ceux qui s’y livraient que joie et plaisirs, j La critique s’était faite la complaisante de la production ; ce que celle-ci j mettait au jour, l’autre y applaudissait. Pouvait-il en être autrement ? Les j deux plumes étaient presques toujours tenues par la même main. Le public I était comme étouffe dans celte double et simultanée action de la presse pro- j duclive et laudative. On ne loi donnait ni le temps de réfléchir ni le temps de t parler ; c’est tout au plus si ou lui donnait le temps de lire. On ne lui laissait j que le loisir d'admirer. Il était entraîné sur un chemin de fer par une ma- , chine à vapeur qui le faisait aller si vite qu'il ue savait plus d’où il venait et | où il allait. Chez nous , ceux qui voyaient l’omnibus littéraire emporté si rapi- j dément, osaient à peine regarder ceux qui le composaient et ceux qui le j conduisaient. La tôle tournait à tout le monde ; quelques-uns, prévoyant la catastrophe , disaient, — et c’étaient les plus hardis : — «Il faut attendre » ; las autres, plus ou moins fasciné», ue se rendaient compte de rien : nul ne voulait voir la proximité de la tempête. — Pois, un jour qu’il semblait faire encore plus beau que de coutume, le point noir de l’horizon fut aperçu, et le plus terrible des en fa ns que le Nord put détacher contre le fol équipage tom ba comme la foudre sur le bâtiment de la littérature moderne. La Revue d’Edimbourg, posée sur un phare éloigné qui la met hors de toutes ces atteintes que les moins timides redoutent dans le cercle de leurs relations journalières, vint foudre, il y a six mois , sur les ouvrages et les réputations de notre temps. Elle trouva les auteurs assis à un grand banquet, où , suc cessivement, ils s’étaient appelés les uns les autres. Couronnés de fleurs, riant, mangeant et buvant, iis avaient fini par se persuader qu’eux seuls sc con naissaient ; qu’eux seuls savaient combien ils étaient à la fois frivoles et fous; qu’eux seuls aussi, liés par leur franc-maçonnerie, disposant d’une sorte d’o pinion publique, et ne disant jamais le vide «*t le faux des ouvrages qu’ils avaient mis en vogue, jamais personne ne s’en apercevrait ou ne s’aviserait de le dire. La Revue écossaise est venue troubler ces joies et confondre ces combinaisons. Quoiqu’elle portât, sur les auteurs et leurs œuvres, des jugemens incomplets, elle était pourtant sur la voie (les vérités qu’il fallait pu-...
À propos
Publié d’abord sous le nom La Quotidienne en 1792, ce journal royaliste est l’organe principal de Joseph-François Michaud. Historien des croisades, ce dernier est d'abord républicain, puis devient royaliste par hostilité à la Convention. Ces revirements firent changer le journal de nom plusieurs fois durant la Révolution, l’Empire et la Restauration avant de retrouver, en 1814, son titre initial. En 1815, le journal devient la Feuille du jour.
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