Extrait du journal
adopte et défend sans doute avec franchise , avec persévérance, les principes de cette constitution ; il doit être conséquemment toujours prêt à soutenir , à ses risques et périls , les pouvoirs qu’elle institue, les droits qu’elle garantit, soit que l’attaque dont ces droits et ces pouvoirs sont menacés vienne du trône ou du peuple. Les doctrinaires ont-ils suivi cette conduite ? La Constitution de 1814, en instituant la chambre des pairs , celle des députés, en modifiant, l’exercice de la royauté, en créant un corps électoral, donna évidemment à ces divers pouvoirs des droits indépendans ; c’est ainsi que le corps électoral put choisir ses mandataires , indépendamment de la volonté ou même des préférences royales. C’est ainsi que la chambre des députés put choisir librement ses candidats à la présidence et ses commis saires , sans que le souverain fût autorisé à blâmer ces choix , encore moins à les repousser. Mais si la chambre des pairs , comme assemblée législative, ou comme cour judiciaire , exerçait une action indépendante de la couronne; si le corps électoral, si la chambre des députés n’étaient pas moins libres dans l’exercice de leurs attributions constitutionnelles ; si le département de l’Isère , par exemple , a pu choisir pour député un régicide, sans que le frère de Louis XVI fût constitutionnellement autorisé à adresser un blâme public aux électeurs de ce département, il faut bien reconnaître aussi que le roi était libre, complètement libre de choisir ses ministres, sans qu’aucun des autres pouvoirs pût blâmer officiellement son choix. Certes, il y a dans un gouvernement tel qu’était le nôtre, des règles de sagesse et de convenance dont; un roi ne doit pas s’é carter ; quoique le droit de choisir ses a gens soit absolu, il doit exercer ce droit avec prudence, nous ne le nions pas; mais une faute commise dans l’exercice d’un droit, ne saurait ni le détrui re, ni étendre celui des autres pouvoirs constitutionnels. Pour que la constitution eût investi les chambres du droit de contrôler le choix des ninistres et de les repousser, il eût fallu que ces pouvoirs eussent été privés par elle de la possibilité de débarrasser l’état d’un mauvais ministère, et il n’en était pas ainsi. Ce ne sont pas des noms plus ou moins impopulaires, plus ou moins calomniés, qui décèlent légalement de mauvais minis tres : ce sont de médians actes, c’est une administration vicieuse, un système blâmable. Or, l’examen des actes des ministres de 1830 appartenait aux chambres, elles pouvaient repousser froi dement leur système, rendre impossible leur administration sans sortir de leur droit, et amener ainsi le roi à changer son minis tère sans i’obliger à défendre les prérogatives de sa couronne contre une dangereuse usurpation. Si les doctrinaires ont suivi cette marche en 1830 , s’ils n’ont point voté l’adresse des 221, nous admettons leur prétention nou velle ; s’ils l’ont votée, au contraire, celte prétention est inadmis sible ; car rien ne fut plus inconstitutionnel qu’une pareille adresse. Or, les doctrinaires Vont votée, ils l’ont votée sachant bien qu’ils faisaient un acte contraire à la constitution, hostile à la monarchie, et il est impossible qu’ils le nient, car M. Royer-Col lard, lui-même, leur donnerait, comme nous , un éclatant dé menti. Le Journal des Débats cependant invoque le nom de cet honora ble député et l'accole à celui de M. dv Broglie; nous distinguerons entre ces deux hommes; car si l’ancien président de la chambre a accepté la révolution, il l’a au moins jugée d’abord; l’élu du 9 août ne le comptera jamais au nombre de ses ministres ; mais enfin puisque le Journal des Débats place son nom en tête du parti doctrinaire, il ne récusera pas apparemment son témoignage. Or, voici son opinion sur l’adresse des 221. « Le jour oit le gouvernement n’existera que par la majorité de » la chambre, le jour où il sera établi en fait que la chambre » peut repousser les ministres du roi et lui en imposer d’autres » qui seront ses propres ministres, et non les ministres du roi, » ce jour-là c'en est fait non seulement de la.charte, mais de notre » royauté, de cette royauté indépendante qui a protégé nos pères, » el de laquelle seule France a reçu tout ce qu’elle a jamais eu » de liberté et de bonheur, ce jour-là nous sommes en républi» que (1). » Qu’en dit le Journal des Débats? Si delà prétention admise cn fait d’imposer au roi l’option entre ses ministres et une chambre sure d’être réélue, résulte, selon le chef des doctrinaires, l’aboli tion dc la charte et de la royauté; si l’état républicain est le résul tat nécessaire d’un pareil fait, le parti qui a contribué à l’établir sera-t-il fondé à se dire monarchiste constitutionnel? pourra-t-il se vanter d’avoir tout fait pour retenir la royauté légitime sur le bord de l’abîme, et ne s’exposera-t-il pas au contraire à ce que M. Royer-Collard lui-même, lui rappelant ses propres paroles, lui réponde : nous l’avons creusé sciemment. Dites, et dites franchement, que vous avez fait une question de personnes',d’unejqueslion toateconstituiionnelle; et en vérité, vous ferez encore pitié, car est-on bien fondé à attaquer la royauté lé gitime pour des noms tels que Labourdonnaye, Chabrol, Polignac, Courvoisier, Montbel ou de Rigny, quand on défend la royauté révolutionnaire avec les Mérilhoû, les Thiers, les Barthe, les Montalivet et tant d’autres qui ont fait dans des sociétés anarchi ques leur apprentissage gouvernemental. Nous le répétons , le parti doctrinaire conservera son nom en dépit de ses prétention» , que lui-même , au reste , combat par inadvertance. Le Journal des Débats reproche à ses adversaires de vouloir tourner contre son parti une révolution qu’ils ont faite avec lui, qu’ils n’auraient pas faite sans lui. L’aveu est remar quable ; il est difficile , après une pareille déclaration, de se dire encore du parti monarchiste constitutionnel sous la Restaura tion ; car rien ne semble moins monarchique ni moins consti tutionnel , qu’une révolution qui renverse le monarque et la constitution. Mais enfin un autre roi, ou dit tel, une autre charte, ont rem placé ce que la révolution a détruit ; le parti doctrinaire est-il fondé depuis 1830 à se dire parti constitutionnel ? Quelques-uns de ses chefs sont au pouvoir, ils sont donc mo narchistes? A la bonne heure ; mais sont-ils constitutionnels ? c’est une question que les faits ont résolue, et ils sont peu favo rables aux prétentions doctrinaires. La charte , depuis le 13 mars, a été violée dix-sept fois , et au. cuue de ces infractions plus ou moins graves n’a fait sourciller le Journal des Débats ; s’il s’était montré seulement dix-sept fois moins facile sous la Restauration . le duc d’Orléans serait encore au Palais-Royal, Charles X serait aux Tuileries, le budget de (1) pa otes de M. Royer-Collard 4 la chambre des députés, 12 février 1810./'^' H? Rjr...
À propos
Publié d’abord sous le nom La Quotidienne en 1792, ce journal royaliste est l’organe principal de Joseph-François Michaud. Historien des croisades, ce dernier est d'abord républicain, puis devient royaliste par hostilité à la Convention. Ces revirements firent changer le journal de nom plusieurs fois durant la Révolution, l’Empire et la Restauration avant de retrouver, en 1814, son titre initial. En 1815, le journal devient la Feuille du jour.
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