Extrait du journal

O n’a été hier une nouveauté pour aucun de nous de voir par quel effort politique on tend à concentrer toute la na tion de France dans une certaine classe préconçue, qu’on appelle à dessein du nom (le bourgeoisie, pour la faire con fondre avec la grande bourgeoisie de l’histoire. Selon ce système, c’est une portion définie de la vieille France qui a fait la société des temps nouveaux. Selon l'his toire, c’est la monarchie qui a fait celle société, non point la monarchie seule, isolée, inspirée par des pensées propres de domination, mais la monarchie obéissant à l’intérêt so cial, et secondée dans sou œuvre de génie par le génie du peuple entier. Qui ne le sait ? Dans ce grand travail de dix siècles, les rois de France, marchant à la tète des idées, résumaient la pensée publique h mesure qu’elle sc formulait sous l’inspira tion du christianisme. Mais dans ce long enfantement, la noblesse, le clergé, le tiers-Etat, ces grandes classifications alors légales, aujourd’hui brisées, avaient leur office distinct, la noblesse par la vaillance et le sacrifice, le clergé par les vertus et par les lumières, le tiers-état par l’émulation du patriotisme et le travail de la liberté. Aujourd’hui c’est mentir à l’histoire et à la conscience de tous les hommes que de venir rompre l’unité de cette ma gnifique élaboration des siècles, «pie de venir déclarer, soit du liant d’une chaire, soit du liant d’une tribune, qu’une de res classifications disparues, seule a droit à l’admiration publique, seule a eu l'intelligence de la vie politique, seule a constitué la liberté. Ah ! la tromperie est facile, lorsque pour se faire une force de la vanité de quelques-uns, on leur annonce avec pompe que c’est d’eux qu'est venue la transformation des temps. Mais la vérité de l’histoire prévaut sur les applaudisscmens de l’ignorance et de l’ingratitude. C’est la nation tout en tière, et non point une pu: lion distincte de la nation, que l’histoire loue de ses instincts et de son génie. Et pourquoi d’ailleurs ce souvenir des classifications dans un temps qui ne supporte plus de classifications? C’est apparemment qu’on a besoin d'exclusion, après qu’on a eu besoin de nivelle ment et d’égalité. De là un système de dénigrement et de satire suppléant dans l'élude des vieux temps à la médita tion et à la justice. La noblesse, vient-on dire, n’a jamais en l'intelligence de la vie politique ! Mais qu’est-cc donc que d’avoir rempli son office social dans un cours de dix siècles ? La noblesse a glo rifié toutes batailles qui forment la couronne historique de la France. N’est-r.e pas là une belle partie île la vie politique d’une nation ? Et puis, s’il est vrai que le peuple, cette au tre classification devant laquelle nous nous inclinons, vous, héritiers des grandes races, nous leurs rivaux de patriotisme, s’il est vrai que le peuple a fécondé de ses sueurs et de son sang cette œuvre séculaire de la liberté, pourquoi donc ne pas lire dans l’Histoire, ce qu’il a trouvé d’assistance, je no dis pas, seulement dans l'Eglise ou dans la Monarchie, mais dans la noblesse même? De Louis-lo-Grosh Louis XIII, île Suger .à Richelieu, partout vous voyez,à côté des politiques de l’Eglise, les politiques de la noblesse, aussi bien que les politiques du tiers-état, tous assis près du Trône pour aller mir sa sagesse et fortifier sou génie. Ou bien si les noms propres paraissent une expression in complète de la marche des pensées sociales, eue,ire avons nous h reconnaître et à publier, nous qui aimons le peuple et ne dénigrons pas ses bienfaiteurs, que s’il a grandi, c’est par...