Extrait du journal

sommes coupables ! murmuraient les lè vres de la dévote. — Que nous sommes à plaindre, répon dait sa pensée, tandis que la porte se re fermait et qu’elle rentrait dans la grande solitude grise de l’appartement vide. Anton in ne se croyait pas moins malheureux qu’elle ; il avait plus qu’elle pourtant son indépendance, avec autant d’esprit qu’il en faut pour aviser aux moyens de se soustraire à une corvée in tolérable. Or, les comédies et les drames qui se jouent sous le nom de l’amour, quelque petite part que l’amour y prenne, emploient tous les mêmes ressorts ; pour secouer l’indifférence de sa maitresso, l’amant d’Adricnne n’imagina rien de mieux que l’absence; lui-même au moins y devait gagner le plaisir du retour. Il prit le parti d oublier deux rendez-vous ; un troisième lui fut assigne, dans une lettre qui témoignait d’un si violent dé sespoir, qu’il en fut rempli d’aise ; mais il prenait goût à la liberté, et l’école buis sonnière qu’il fit, par un beau soleil, pour arriver à ce troisième rendez-vous, ic lui fit manquer comme les deux autres. Durant ces quelques jours, Olympe, qui commençait à s’inquiéter et à lui trouver les allures d’un garçon qui se dérange, se rassura et le vit tout autre : gai, heureux, expansif comme elle ne l’avait jamais connu au retour des longs vagabondages où il était allé perdre son temps sans souci de l'heure. Ce ne fut pour ainsi dire que par obli gation, par acquit de conscience, qu’il retourna auprès d’Adrienne. Si Adrienne n’avait pas été la femme d’un ami chez qui il devait ce soir-là même prendre le thé, peut-être ne l’aurait-elle jamais revu ; d'autant plus quo le sentiment de sa petite perfidie, dont sa naïveté lui exagérait la noirceur, ne le laissait pas...