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La République française, 19 mai 1909

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La République française
19 mai 1909


Extrait du journal

Le juge entend les témoins. — Graves dé clarations. — Un précédent. — Les cou reurs cyclistes M. André, juge d’instruction, a décidé de ne procéder à l’interrogatoire des trois pré venus que vers la fin de cette semaine. En attendant, il reçoit les dépositions des témoins. Parmi celles-ci un témoignage d’une importance considérable a été produit, celui de M. Ernest N au, forgeron, 33, rue du Château. Les procédés du capitaine Au mois de septembre dernier, M. N au faisait une période de neuf jours dans la territoriale, à la Rochelle. Il était alors ma lade, et le huitième jour, il partit sans rien dire ,pensant qu’il n’y avait pas grand mal à gagner un jour, la libération devant avoir lieu le lendemain. En outre, il espérait qu’on ne s’apercevrait pas de son absence. H n’en fut rien, et dès son retour à Pa ris, il fut avisé qu'il était poursuivi pour dé sertion. Quelques jours plus tard, il était convoqué chez le capitaine rapporteur du 1er conseil de guerre chargé de l’affaire. C’était le capitaine Marix. Il me fit, dit Nau, faire longtemps antichambre et c’est en sortant seulement de son cabinet qu’il m’aperçut et me demanda l’objet de ma visite. Je lui répondis que je m’appelais Nau et que j’étais convoqué. — Ah ! c’est vous, me dit-il. Entrez donc, j’ai à vous parler. Votre affaire est très grave, mais je suis un bon garçon et je désire vivement vous tirer de ce mauvais cas. Vous êtes marié, vous avez des enfants. Il serait déplorable pour votre famille que vous ayez à subir la grave peine que comporte votre faute. Voyons, combien gagnezvous l — Je gagne, lui répondis-je, un franc l’heure. — Vous devez vous faire de bonnes semaines et vous devez avoir quelques économies. Ne pourriez-vous pas donner 500 francs, et l’on vous tirerait de là ? — Mais je n’ai pas celte somme à ma dispo sition. Je vis au jour le jour. Il m’est impossible de donner 500 francs. — Allez, allez, réfléchissez bien, et apportezmoi votre réponse dans quelques jours. Quelques jours après, je fus cité de nouveau. Le capitaine Marix me parla des 500 francs, mais je lui dis qu’il était inutile de me les demander, que je ne les possédais fias et qu’il m’était im possible de me les procurer. Alors, son attitude changea complètement. Il me déclara que les renseignements recueillis sur moi étaient très mauvais, que j’étais un alcoolique, un violent, que ma femme elle-même se plaignait de moi. Bref, je finis par m’emporter moi aussi, et il me fit arrêter séance tenante. Au mois de février dernier, j’ai comparu devant le conseil de guerre, et j’ai été condamné à trois mois de prison avec sursis. En terminant, Nau a fait une déclaration fort grave et qui va être vérifiée. Il prétend qu’un certain Bonnet, qui était en prison avec lui au Cherche-Mdi, et qui avait été condamné à six mois de prison pour insou mission, put s’échapper facilement de la maison de détention et qu’il le retrouva peu après à Vaugirard. Il lui demanda comment il avait pu recouvrer sa liberté,lui faisant observer qu'il pourrait bien être re pris. Mais Bonnet répondit qu’il n’avait rien à craindre, car son beau-frère avait donné pour lui 600 francs au capitaine Marix. Un client qui s’est ravisé M. André a entendu hier, M. d’Availles. M. d’Availles avait, sur le conseil d’un de ses amis, décidé de s’adresser au capitaine Marix pour avoir une remise de la peine à laquelle il avait été condamné. J1 en fut, on le sait, détourné par M. Gentil, député des Deux-Sèvres. Sa déposition a été très courte. Le témoin n’a jamais été, en effet-, en relation directe avec le capitaine Marix. Il a reconnu qu’il avait eu connaissance des propositions de cet officier, qui offrait son entremise moyen nant le versement d’une somme de 3.000 fr. Une ancienne affaire M. André s’est également fait transmettre un dossier concernant une affaire de trafic d’influence et dont M. Chônebenoit avait eu à s’occuper rl y a deux ans. A cette époque, à la suite de diverses plaintes, une enquête de police avait été faite, suivie d’une ins truction judiciaire. Il s’agissait déjà d’exemptions frauduleuses de jeunes sol dats, de sursis pour des réservistes et ter ritoriaux. Une perquisition avait été opérée à cette occasion chez un agent d’affaires, M. Grenier, 29, rue Tronchet. Lorsque M. Hamard se présenta à cette adresse, il fut reçu par un soldat. C’était l’ordonnance du capitaine Marix, qui pre nait pension chez l’agent d’affaires et lo geait chez celui-ci. L’enquête n’aboutit pas, paraît-il. Du moins, elle n’eut aucune suite. On avait bien saisi des dossiers concernant des de mandes de grâces, mais aucun n’avait trait à des truquages relatifs à des militaires. M. Grenier ne nie pas d’ailleurs qu’il tut en relations avec le capitaine Marix, mais il ne traitait, dit-il, avec lui aucune affaire et ses relations étaient purement amicales. Les coureurs cyclistes En annonçant hier l’arrestation de Ruinart, le coureur cycliste, nous disions que celui-ci avait fait à Agen la connaissance de Cirés, le complice du capitaine Marix. Ruinart se serait entremis pour trouver dans le monde des coureurs des clients au capitaine Marix et à Cirés, dit Serès. Parmi ces clients, on cite Petit-Breton, bien connu par ses triomphes dans les courses sur route, et Poulain, ancien cham pion du monde et ancien champion de Fran ce. Le cas de ce dernier est assez curieux : 9 y a quelques années, on contesta à ce cou reur sa nationalité. Poulain est né à Jersey de parents français. Comme il n’avait fait aucun service militaire, ses camarades pro testèrent contre son admission à courir les championnats de France....

À propos

Face à une gauche qui ne parvient pas à contenir ses partisans, Léon Gambetta entend rassembler une majorité de républicains autour d’un nouveau quotidien, organe de l’Union Républicaine : La République française. Grand journal à 15 centimes, il consacre une part importante de son contenu aux nouvelles de province et joue un rôle considérable dans la victoire des républicains contre les conservateurs. La mort de Gambetta provoque de facto un infléchissement de la publication qui s’éteint lentement jusqu’en 1931.

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