Extrait du journal

Les socialistes en général, et la Petite Ré publique en particulier, sont fort mécontents du préfet de la Seine. Voici pourquoi : Il y avait à nommer cinq surveillants à la Bourse du travail. Or, ces nominations sont du ressort de la préfecture de la Seine et l’on vient de nommer aux emplois en question cinq anciens sous-officiers, en application de la loi de 1889, qui réserve certaines catégo ries d’emplois aux sous-officiers rengagés. C’est ainsi que l’on attribue à des anciens mi litaires les postes de gardiensde square, de ci metière, de musées et de palais appartenant à l’Etat, tels que le palais du Luxembourg, le palais Bourbon, le palais de Justice, le palais de la Bourse, etc. Maie si les socialistes tolèrent que l’on place d’anciens soldats dans tous ces palais, il eh est un où ils ne l’admettent pas. C’est dans l’édifice sacré qu’on appelle la Bourse du travail, sacré à leurs yeux non pas parce que c’est un bâtiment réservé aux questions ouvrières, mais parce que c’est « le temple » du dogme socialiste. Que l’on mette d’anciens militaires pour surveiller la Bourse des bourgeois, celle qui est située entre la rue Vivien; e et la rue Notre-Dame-dcs-Victoires, soit ! Mais en agissant de même pour la Bourse de la rue de Bondy, M. de Selves a simplement lancé un défi et une provocation « au monde des travailleurs ». On voit bien que cet homme-là a eu un ministre de la guerre dans sa fa mille. Il n’a pas l’air de se douter qu’il a violé le principe de « l’autonomie de la Bourse du travail » en ne réservant pas ces emplois à de e vieux travailleurs », comme le dit avec amertume la Petite République, qui montre le préfet militarisant la Bourse du travail, au moment où l’on parle de démilitariser le corps des pompiers : « Bientôt, dit-elle, on » nous dotera d’un règlement militaire, puis » l’on instituera des peines disciplinaires pour » les secrétaires de syndicats qui auront eu » l’audace de ne pas parler aux adjudants le » petit doigt sur la couture du pantalon... La » Bourse du travail est transformée en ca» serne... » L’organe socialiste n’est pas dupe de ses hyperboles. Il sait très bien que l’on n’insti tuera ni règlement militaire,ni salle de police pour les e travailleurs » et que la Bourse du travail ne sera pas transformée en caserne, pas même en caserne civile. Ce qui le choque, c’est qu’on ait donné à d’anciens militaires les emplois qu’il aurait voulu voir attribuer à d’anciens militants du socialisme. Si M. de Selves, par exemple,avait nommé cinq vétérans des bataillons de la Commune, il n’aurait recueilli que des éloges dans la Petite République. Mais voilà, M. de Selves n’y a pas songé, pas plus que n’y pense son collègue, M. Lépine, quand il nomme de nouveaux gardiens de la paix. E. V....