Extrait du journal

LES * RETARDATAIRES ». — Le père Renan n'avait pas tort de dire, il y a soixante ans, que la France avait laissé tomber « son centre de gravité » un peu bas. Et notre cher contemporain et ami Abel Bonnard n'a pas tort, lui non plus, d'écrire aux Débats de l'autre soir ces lignes de triste lumière : Le pays en retard. — Le pays en re tard, c'est le nôtre; telle est, du moins, l'idée que donnent de lui ceux qui le re présentent. On peut se figurer nos politi ciens sous bien des aspects; mais ce sont, avant tout, des retardataires. Ils usent d'une rhétorique qui ne répond plus à rien. Ils récitent des formules qui devraient, selon leur attente, commander aux vents et aux flots; mais les flots s'en moquent et les vents soufflent de plus belle. Sous un ciel où l'orage s'amasse, sur un sol où les obstacles se multiplient, l'un court où il aperçoit du monde avec un vieux trombone d'où il pense tirer des sons irrésistibles ; un autre s'apprête à nous enchanter par une éloquence plus flûtée. Pendant ce temps, des forces se lèvent, des dangers se_ précisent, les choses pré sentent leurs mille visages, partout un sphinx veut être deviné: clans une pareille occurencc, il serait bien nécessaire d'avoir une bonne politique; mais ce serait déjà un progrès pour nous d'en avoir une mau vaise, si elle nous ramenait au moins sur le terrain du réel. Il est d'autant plus pressant d'y revenir...