Extrait du journal

d’interdire à leurs ouailles comme le plus damnable des péchés. Ces superstitions, impressions premières de l'en fance, suivent parfois l’homme le plus intelligent à travers son âge mûr; longtemps endormies, elles s’éveillent un soir de brumes, par une nuit obscure, à une heure solennelle et poignante,et elles se dres sent alors aux yeux effrayés de ceux qui ne croyaient plus en elles, drapées dans cette fière, mélancolique et sauvage poésie dont les peuples primitifs ont coutume 4é revêtir leurs croyances et leurs traditions. Lord Bothxvell, le sceptique et l’impie, le railleur et le criminel lord Botbwell, et lord Maïtland, son digne complice, lorsqu’ils eurent jeté les yeux sur cette femme en hailloue, sur cette mendiante qui se traînait à leurs genoux et leur demandait te cha rité d’une voix suppliante, se souvinrent en même temps d’une légende fameuse, la Femme des Bruijè Te.;t dont on avait bercé leur enfance. Cette légende, terrible entre toutes, avait cours, parmi les soirées des clans, dans les montagnes écossaises ; les aïeux la redisaient à leurs petits fils frissonnants, et plus d’un pâtre, attardé dans les bruyères d’un sombre vallon, était rentré tout effaré, prétendant que, parmi les soupirs du vent, il avait distingué les sanglots de l’héroïne de cette sombre histoire que nous allons vous raconter en quelques mots. Au temps jadis...— à l’époque où vivait lord Bothxvell, il y avait bien des siècles déjà,— au temps jadis, disons-nous, il y avait, dans une gorge des monts Cheviot, un vieux Castel habité par une jeune châtelaine. La comte*se Blanche, c’était son nom, vivait...