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L’Aube, 14 janvier 1945

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L’Aube
14 janvier 1945


Extrait du journal

par Roger BASCHET, correspondant de. gu&rre LORSQUE je descendis du train à Bruxelles je ne vis la ville que par petits morceaux. La circulation était intense : j'en entendais les bruits derrière un rideau de brouillard et me heurtais à d'intermi nables files de tramways, à des encombrements de voitures militaires et de camions, à une foule dense presque impénétrable que contenaient avec peine les trottoirs... Foule panachée de kaki où dominaient les uni formes anglais mais qui charriait des hommes appartenant à tous les continents et à toutes les races. J'entrevis en quelques instants un Nor végien, un Polonais, un Russe, un Hollandais, des Français, des Belges ; tous les Dominions depuis l'Australie jusqu'à l'Afrique du Sud et tous les peuples libres ou encore opprimés y étaient représentés. Chacun portait sa nationalité inscrite sur son épaule ; les passants s'arrêtaient pour déchif frer l'inscription ou la vignette comme des amateurs de timbres rares. Quant aux soldats eux-mêmes ils ne s'adressaient la parole qu'avec circonspection, essayant parfois deux ou trois longues avant de se com prendre. Les Anglais ont à Bruxelles 48 heures de permission toutes les huit semaines et la ville a, pour les accueillir, ouvert une immense foire regorgeant de bonbons, de gâteaux, de nougats, de crêpes, de glaces, vendus dons les pâtisseries, les magasins, les éventaires avec ou sans tic kets. Les devantures sont en outre encombrées d'objets-souvenirs de toutes sortes, depuis les jouets en bois découpé jusqu'aux mouchoirs brodés. Il ne faut pas s'y tromper : il ne s'agit là que d'une exubérance superfi cielle qui bouillonne dans les rues et les lieux de plaisir, mois s'arrête aux porches do; habitations privées où la vie reste sévère. Essentiellement accueillant, le Belge a la politesse de ne point étaler ses souffrances de quatre années de résistance acharnée. Il aspirait à un renouveau que ne semblent pas lui apporter les hommes de 1940 revenus au pouvoir. La récente fusillade de ia rue de la Loi le lui a suffisamment prouvé. — Ah ! Comme nous vous envions d'avoir un général de Gaulle ! ai-je entendu dire de tous côtés. Il suffit, à Bruxelles, pour connaître l'opinion publique de monter dans un tramway et d'attendre qu'on vous parle. Au bout de deux stations on sait aiors que la population s'indigne de ne point assister à la punition des traîtres et des gros trafiquants : on entend flétrir le marché noir élevé ou rang d'institution mais inaccessible aux classes laborieuses et aux innombrables réfugiés qui suroetmîcnt la ville. (LIRE LA SUITE EN DEUXIEME PAGE, 5' COLONNE.)...

À propos

L’Aube est fondée en 1932 par Francisque Gay et Gaston Tessier. Ce journal d’opinion, d’obédience catholique et de gauche, a d’abord beaucoup de mal à rallier les catholiques démocrates du pays à cause de son positionnement pas vraiment clair entre socialisme et Église. Il arrive néanmoins à fidéliser un lectorat restreint. Pacifiste et favorable à la politique de Locarno, L’Aube fut souvent violemment attaquée par la droite catholique ainsi que par l’extrême droite, notamment L’Action française.

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