Extrait du journal

Trois demandes d’interpellation avaient été déposées sur les déplorables événements de Limoges par MM. A. Refile, Gauthier (de Clagny) et Vaillant. M. Etienne, ministre de l’intérieur, a ré pondu. Voici le résumé de ses explications d’après le compte-rendu analytique du Jour nal officiel. C’est l’historique des faits : M. Etienne. — Je dois faire connaître à la Chambre tous les documents que j’ai reçus sur la grève de Limoges. Ils m’ont été adressés par le uréfet, qui est un homme de bien, de conciliation et de dévouement. Les ouvriers peintres se sont mis en grève le 29 mars, parce que M. Théodore Haviland n’a vait pas répondu à leur demande d’exclusion contre un contremaître de cette maison. Les pourparlers engagés entre les délégués des ouvriers et les patrons qui s’étaient solida risés avec M. Haviland n’ayant pu aboutir, la rupture allait se produire quand, sur la de mande du gouvernement, les patrons retardè rent do quarante-huit heures la fermeture des ateliers. Une nouvelle intervention du préfet pour concilier les ouvriers et les patrons n’eut pas de résultat. Malgré l’excellente attitude du maire, M. Labussière, dix-neuf usines furent fermées. Le 15 avril, à la suite de troubles que le ! maire avait été impuissant à réprimer malgré j tous ses efforts, le préfet fut amené à prendre la direction des mesures d’ordre. Un escadron de cavalerie dut dégager l’usine Touzé, dont le directeur avait été blessé, ainsi que son gendre. Les manifestants envahirent des boutiques d’ari mûriers, mais furent finalement dispersés. ; La nuit suivante, une bombe éclata devant la ; porte de M. Chadal, directeur de l’usine Havi land ; mais il n’y eut heureusement que des dégâts matériels. La journée du 16 s’est passée sans incidents. Le préfet prit un arrêté pour qu’aucun cor tège ni attroupement ne soit toléré. M. Allard. — C’est une provocation. M. Etienne. — Dans la nuit du 16 au 17 avril, vers 4 heures du matin, à la suite do la 1 ‘ perquisition pour retrouver les revolvers volés, cinq arrestations eurent lieu. La journée du 17 fut calme jusqu’à 2 heures ; alors commença la réunion des grévistes à la ; suite de laquelle un cortège précédé du drapeau | noir alla à la préfecture demander la mise en liberté des personnes arrêtées et le retrait des troupes. Le préfet, après avoir pris l’avis du gouver nement, du ministre de l’intérieur et du garde des sceaux (c’était aussi l’avis du président du conseil), refusa la mise en liberté provisoire des • personnes arrêtées, qui étaient de dangereux malfaiteurs. C’est alors que la manifestation se dirigea vers la prison ; elle fut dispersée, mais se reforma sur la place du Champ-de-Foire. L’infanterie dut sortir pour dégager la cavalerie qui, pendant une heure, était restée impassible sous une grêle de pierres et de projectiles divers. Malgré les sommations légales faites par le commissaire central, les manifestants ne se dis persèrent pas ; ils tirèrent des coups de revolver sur les soldats qui, à leur tour, exaspérés, tirè rent sans en avoir reçu l’ordre. Voilà l’historique des faits. Il y a eu deux morts, peut-être un seul, car la seconde victime n’a pu être retrouvée malgré toutes les recherches. D’un autre côté, il y a eu 8 officiers blessés, dont un assez gravement, et 60 hommes de ! troupe blessés. Il faut que l’ordre soit maintenu. Des ordres formels ont été donnés dans ce sens. Mais il faut aussi faire appel à l’abnégation, au dévoue ment de tous, pour empêcher le retour d’aussi déplorables événements. bans cette journée de deuil il ne peut y avoir de question de parti. Nous nous attacherons à montrer à la popu lation ouvrière que nous ne cesserons pas d’es- • sayer d’améliorer sa situation. A la nation tout j entière, nous dirons que nous voulons l’ordre...