Extrait du journal

La cérémonie ajournée Reculait d’année en année : « Trop faible encore! » disait-on. Enfin, soustraite à la chloras, La face du baby dormant Faiblement (oh ! bien faiblement) Se nuance d’un peu de rose.... Enfin, enfin ! son tuteur ose Risquer au moins un ondoiement! — Or, comme elle est, l’enfant débile, L’espoir du peuple roturier, A la fête on a dû prier, Par une politique habile, Tous les puissants de qui la bile Sait jeter un sort meurtrier. C’est pourquoi, comme dans les contes De Perrault, l’on a vu venir Des seigneurs à n’en plus finir, Des ducs, des marquis et des comtes, Pour la garer de tous mécomptes Et la doter dans l’avenir. — Non sans quelques accrocs sans doute, Non sans marcher sur maint pétard Que la main d’non méchant moutard A dessein sema sur la route, Au rendez-vous, coûte que coûte, Tous sont venus, bien qu’un peu tard. Quoique, allant où son poids l’entrains, Boitât de droite le parrain, Et qu’à gauche, du même train Claudiquât la pauvre marraine, Ils ont pu sans trop de migraine Marcher d’accord, grâce au terrain. Leurs mains, fermement enlacées, Ont tenu l’enfant sur les fonts... — On peut, vu la hausse des fonds, Rire des épaules haussées, Les choses s’étant bien passées, Malgré des incidents bouffons : A bénir l’enfant réchauffée Quoique chacun fût invité, Et malgré la civilité Du procédé, s’est rebiffée Rageusement la vieille fée Qu’on nomme Légitimité. Trépignant sur sa chaufferette, Elle a, la. folie en cheveux gris, Brandi sa béquille, au mépris Des bonnes façons qu’on lui prête, En déchaînant sur la pauvrette Ses anathèmes et ses cris... Imprécations sacrilèges Mais risibles de style ancien ! Impuissant courroux que le sien ! L’enfant est sauve de tous pièges ; On a brisé les sortilèges D’un pire nécromancie ! On a conjuré la malice Noire d’un bien autre sorcier, Moustachu comme un policier, Et que seconde maint complice, Et qui toujours échappe et glisse • Et rit des menottes d’acier....