Extrait du journal
sans doute de Trappe et tu viens me parler des magnifiques expériences qui ont eu lieu hier. — Que le diable les emporte, vos expériences, elles m’obligent à vendre le lopin de terre que j’ai acheté l’an dernier. Trouvez-moi tout de suite un acquéreur. — Toi qui as tant travaillé pour devenir proprié taire, te voilà déjà las de ta propriété. — Las, non pas; mais comment voulez-vous que je l’exploite? On a inventé des machines à mois sonner, des machines à faucher, des machines à la bourer, des machines à semer, des machines à drai ner qui font en une heure le travail de cent hommes. Il n’y a plus de paysans maintenant, la vapeur les a destitués. Le temps des faucheurs, des moisson neurs, des glaneurs, des batteurs, des botteleurs et des laboureurs est passé. Il faut donc que je vende mon champ ; mais qui voudra me l’acheter? — Une compagnie. — C’est cela ; au lieu d’être comme aujourd’hui un agriculteur libre, je deviendrai un employé de compagnie, j’aurai la veste de velours ou la tunique, suivant mes fonctions, et j’échangerai mon chapeau gris contre la casquette bleue. Je retournerai à l’é tat de serf, je serai attaché à la glèbe industrielle et saint-simonienne, comme disaient deux messieurs qui voyageaient avec moi dans le wagon. — Ah ! ils disaient cela ? — Et ils ajoutaient avec un air de grande satis faction : La féodalité guerrière a fait son temps, mais en définitive la féodalité industrielle et agricole vaut bien l’autre, nous n’aurons en définitive rien perdu au change. Au lieu de dépendre, comme au trefois, du seigneur, les serfs d’aujourd’hui seront à la merci du directeur de la compagnie sous la mouvance de laquelle ils seront placés. L’œuvre de la révolution est détruite. — Diable ! comme ils y vont ! — Le morcellement du sol s’arrête, s’écriait l’un. — L’émancipation de l’individu par la propriété, reprenait l’autre, devient une blague. — Le code civil est enfoncé. — L’homme n’est plus qu’une machine servant d’autres machines. Nous triomphons sur toute la ligne. — Il n’y a plus que trois individualités dans le monde : le banquier, le prêtre, l’homme d’armes. En parlant ainsi, l’un des voyageurs agitait un journal en tête duquel j’ai lu ce titre : YUnivers. Si...
À propos
Fondé par Charles Philipon en 1832, Le Charivari fut le premier quotidien satirique illustré au monde. Régulièrement poursuivi pour sa critique de Louis-Philippe, le journal disparaît néanmoins bien plus tard, en 1937.
En savoir plus Données de classification - clément caraguel
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