Extrait du journal
11 peut bien se faire que la danse apprenne, physiquement, à marcher droit, à se bien conduire, et à ne pas faire de faux pas; mais il faut avouer que les danseurs de la Courtille, de l’Odéon, des Variétés, du Cirque, du Palais-Royal, et de tous les bals publics ou particuliers qui foisonnent à Paris, ne se doutent guère pour la plupart qu’ils font de la vertu. Quoi qu’il en soit, le suffrage de Platon n’est pas le seul que nous puissions citer en faveur de la danse. Homère , ne sachant plus comment louer Mérion, finit par l’appeler bon danseur, en désespoir de cause. Quant à Socrate, il ne pensa pouvoir mieux faire, pour terminer son cours de morale , que de recommencer entièrement son éducation chorégra phique, qui luiacinbla avoir été complètement manquée. Ce fut la célèbre Aspasie, l’une des meilleures baladines, et par conséquent des femmes les plus vertueuses de son temps, qui donna des leçons de danse à cet autre sage des sages. Je n’ai ni la volonté, ni le temps, ni l’espace de vous faire l’histoire du Bal masqué. Il me suffit de dire que c’est un dé rivé du ballet d’action. Or, le ballet d’action était connu des anciens, comme on l’a vu plus haut, et particulièrement des Grecs, de qui la Providence a voulu que nous tinssions nos arts, notre littérature, notre jeu de l’oie, notre soupe à l’oi gnon, et nos jetés-battus. Le principal sujet de leurs ballets, c’était la représentation des révolutions célestes, le cours du soleil, de la lune, des étoiles fixes et des comètes, etc. Ce de vait être fort brillant. Vinrent ensuite les Saturnales des Romains, qui pouvent passer pour les premiers bals masqués, vraiment dignes de ce nom. On fait généralement honneur de leur invention à l’impératrice M e'ssaline, femme très vertueuse également, qui eut tout au moins la gloire de les perfectionner, et y fit représenter des sujets, qui , certes, n’avaient plus rien de bien astronomique. Néron fit aussi beaucoup pour leur per fectionnement, et lui-même daignait courir masqué, les rues et les bals de Rome. C’est aussi ce que faisait Louis XIV. Mais n’anticipons pas sur la chronologie. S’il faut en croire Athénée, ce fut à un nommé PlancusLucius, préfet des Gaules, que le bal masqué dut son impor tation de ce côté-ci des Alpes. Ce préfet donna à ses admi nistrés un bal superbe à Lyon , d’après les us de Rome, et y figura masqué en Glancus, dieu marin à queue de poisson, et pour comble d’agrément, il y dansa sur les genoux. Les préfets de nos jours sont moins amis du mouvement. Quoi qu’il en soit, la planche était faite, et de ce moment, la danse masquée ou simplement travestie,prit sa place dans les mœurs de nos ancêtres ; elle se fit même, dans la suite des temps, catholique et apostolique ; elle se faufila peu à peu jusque dans certaines cérémonies religieuses, cérémo nies qui ont encore des traces dans les vieilles mœurs de beaucoup de nos campagnes. Il ne fallut rien moins que tous les canons de l’église, pour la repousser, tant bien que mal, dans la vie profane, que dès-lors elle envahit tout en tière. Vous savez toutes les folles joies qu’elle jeta sur l’Italie moderne; vous connaissez par tradition ces nuits d’arlequinades, d’illuminations, de douce musique, de hurlemens, de paroles d’amour, de gais propos, de voluptés, de rires, d’i vresses, de coups de stylet, d’orgies, qui rendirent si fameux dans le monde dansant, les carnavals de la Rome papale, de...
À propos
Fondé par Charles Philipon en 1832, Le Charivari fut le premier quotidien satirique illustré au monde. Régulièrement poursuivi pour sa critique de Louis-Philippe, le journal disparaît néanmoins bien plus tard, en 1937.
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