Extrait du journal

peut plus innocente. Elle n’implique, à ses yeux, pas même l’ombre d’une faute ; elle se réduit à quelques échanges de bons procédés, à quelques faveurs bien veillantes, et le plus souvent à une condescendance d’inférieur envers son supérieur. Ainsi, voilà un brave homme qui a sous la main une foule de tableaux. Vient une reine étrangère, une reine artiste par hasard, qui le prie gracieusemeut de lui faire les honneurs de sa galerie. La reine étrangère, après quelques mots flatteurs, daigne in diquer au bonhomme tout ému un tableau qu’elle a envie de copier. Supposons que la reine artiste soit dans’.une position intéressante... Je vous le demande, en conscience, le bonhomme ira-t-il refuser?... Eh! vite,voilà un tableau décroché, emballé,expé dié. Bon voyage ! pas de naufrage, surtout! Jonas lui-même sur toile ne saurait en revenir. Mais ne croyez pas au moins que le digne homme, qui a tant de tableaux sous la main, ait cru dépasser ses pouvoirs, qu’il se soit même demandé s’il ne met tait pas cette main dans la poche de la France. Lui ! ah bien oui ! il s’est cru chez lui, et il a fait comme chez lui. Que voulez-vous! il ignore que le Musée royal n’est pas plus une propriété royale que la cour royale, et que le garde du Louvre n’a pas plus de droits sur les tableaux du Musée que n’en a le garde des sceaux sur les arrêts de la cour. Et voilà comment, d’ignorance en ignorance, notre domaine d’art est mal ordonné, mal soigné, mal...