Extrait du journal
CHAPITRE TTTTT le jugement. Le digne bourgmestre-deSfockernétait coiffé d'un bonnet de drap, et enveloppé d'un manteau; il s'assit pesamment sur le banc : c'était un gros homme de soixante ans environ, d'une figure rogue et renfrognée; de son poing rouge et gras, il frottait fréquemment ses yeux gonflés et rougis par un brusque réveil. Dagobert, debout, tête nue, l'air soumis et respectueux, tenait son vieux bonnet de police entre ses deux mains , et tâchait de lire sur la maussade physionomie de son juge, quelles chances il pouvait avoir de l'intéresser à son sort, c'est-à-dire à celui des orphelines. Dans ce moment critique, le pauvre soldat appelait à son aide tout son sang-froid, toute sa raison, toute son éloquence, toute sa résolution, lui qui vingt fois avait bravé la mort avec un froid dédain; lui qui, calme et assuré, parce qu'il était sincère ek éprouvé, n'avait jamais baissé les yeux devant le regard d'aigle de l'Empereur, son héros, son dieu... se sentait interdit, tremblant, devant ce bourgmestre de village à figure malveillante. De même aussi, quelques heures auparavant, il avait dû subir, impassi- • Taie et résigné, les provocations du prophète, pour ne pas compromettre la mission sacrée dont une mère mourante l'avait chargé, montrant ainsi à quel héroïsme d'abnégation peut atteindre une ame honnête et simple. — Qu'avez-vous à dire... pour votre justification? voyons dépêchons... — demanda brutalement le juge avec un bâillement d'impatience. — Je n'ai pas à me justifier... j'ai à me plaindre, Monsieur le bourg mestre, Dit Dagobert d'une voix ferme. — Croyez-vous m'apprendre dans quels termes je dois vous poser mes questions ? S'écria le magistrat d'un ton si aigre, que le soldat se reprocha d'aToir déjà si mal engagé l'entretien ; voulant appaiser son juge, il s'em pressa de répondre avec soumission : — Pardon, Monsieur le bourgmestre, je me serai mal expliqué; je voulais seulement dire que dans cette affaire je n'avais aucun tort. — Le prophète dit le contraire. — Le prophète.... Répondit le soldat d'un air de doute. — Le prophète est un pieux et honnête homme, incapable de men songe,— reprit le juge. — Je ne peux rien dire à ce sujet, mais vous êtes trop juste, et vous avez trop bon. cœur, Monsieur le bourgmestre, pour me donner tort (1) Toute reproduction, même partielle, de cet ouvrage, est interdite, et serait poursuivie comme ccntiefaç.on. Voir nos numéros des 23, 20, 27, 28, 29 juin, 2, 3, 4, 5, 9 et 10 juillet....
À propos
Le Constitutionnel fut un quotidien politique sur quatre pages, fondé par Fouché et une quinzaine d’actionnaires, pour la plupart contributeurs du journal. D’abord bonapartiste, il s’agissait d’un organe puissant jusqu’à la naissance du Second Empire, rassemblant bonapartistes, libéraux et anticléricaux. Marqué par la personnalité d’Adolphe Thiers, le journal rendait compte des informations diplomatiques européennes, mais discutait également de l’actualité politique française.
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