Extrait du journal
Mlle X est toute jeune; et pourtant elle a déjà éprouvé cruellement l'amère bêtise et la malignité des hommes. L'histoire est drôle et nous la connaissions ; par discrétion, nous l'avions tue. Mais voilà qu'elle commence àcirculer... Peut-être est-il temps de mettre, dans l'intérêt de tout le monde, les choses au point. Un soir, dans la loge découverte d'un musichall à la mode, deux femmes causent. L'une d'elles fait à l'autre ses confidences, conte les récentes visites d'un ami nouveau. L'ami nouveau, pourtant, n'est pas libre; non seulement il l'avoue, mais il s'en vante; il parait qu'on l'adore ailleurs... Et il a nïbntré des lettres qui l'attestent, le jeune fat ! Et ces lettres sont signées d'une jeune fille — d'une vraie jeune fille — entrée depuis peu au théâtre, et. dont les débuts ont été remarqués, très remarqués... < Son nom ? Attendez donc... » Le nom est chuchoté. Mais pas si bas qu'un indiscret, accoudé à l'entrée de la loge et qui suit l'entretien depuis un quart d'heure, ne l'ait entendu. Voilà un homme fort embarrassé. Il a de de nombreuses amitiés dans la Maison à la quelle appartient l'artiste qui vient d'être nom mée devant lui ; peut-être serait-il généreux de faire savoir — très discrètement — à la pau.vre enfant, par quelqu'un de ces amis, qu'on se joue d'elle, et qu'elle eut grand tort de donner son petit cœur à un jeune c mufle > qui la compromet... Mais peut-être aussi n'y a-t-il là qu'une vantardise, un mensonge de gamin coureur de femmes ? A tout hasard, notre homme conte l'incident à un camarade de l'artiste — < gros bonnet > de la Maison, quoi que jeune encore : « Qu'en pensez-vous? De vons-nous parler? » L'autre ricane, fait l'étonné, demande des détails. Hélas ! il se trouve que lui aussi est amoureux de la débutante, et que chaque mot qu'on lui dit est une flèche qu'on lui enfonce dans le cœur... Aussi la vengeance ne se fait-elle pas atten dre. Il a promis d'arranger l'affaire. Et il l'ar range, en effet. Je veux dire qu'il là conte tout bas dans les coulisses, au cercle, dans la rue, — obsédant la pauvre petite d'allusions que d'abord elle ne comprend pas, de sarcasmes qui la troublent, de reproches qui l'ahurissent... et qu'elle repousse avec une belle indignation. Mieux que cela : la jeune comédienne révèle à sa mère, crânement, les soupçons dont on a voulu la salir !... Cris, larmes, tumulte.. Le ca marade avoue ses torts, implore son pardon... Mais la mère ne s'en tient pas là ; elle entend poursuivre devant les tribunaux l'inconnu qui a diffamé son enfant, et On a toutes les peines du monde à lui faire comprendre que Paris est une botté de foin où certaines aiguilles, quand on les cherche, ne se retrouvent"jamais. L'histoire finit-elle là ? Pas tout à fait. " Dans là coulisse, un autre camarade, épris — pour le très bon motif — de la séduisante débutante, a vu d'un œ#1 anxieux se dérouler près de lui ce petit drame... Le voilà aujour d'hui rassuré, — et heureux. Et c'est pourquoi nous assisterons probable ment bientôt à un mariage d'étoiles, où je se rais bien surpris que né fussent pas invités M. Paul Hervieu, M. Brieux et Mme Octave Feuillet. _ Le Pompier....
À propos
En 1854, quatorze ans après la disparition du petit journal subversif du temps de Charles X, Hippolyte de Villemessant relance Le Figaro. Paraissant d’abord sous la forme d’une petite feuille de chou littéraire, Le Figaro absorbe L’Événement en 1866 pour devenir, sans transition, le grand quotidien conservateur que l’on connaît. Dès les années 1880, il abandonne la cause du monarchisme pour adhérer aux principes républicains.
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