Extrait du journal

Nos lecteurs parisiens connaissent le pittoresque village de Marly-le-Roy, si bien campé sur l'une des hauteurs qui bordent la Seine.C'estun paisible bourg-, habité par une population laborieuse qui tire ses ressources de la culture des navets et des carottes. Au premier rayon du soleil levant, le paysan quitte sa chaumière et va cultiver ses champs ; la nuit venue, une longue file de charrettes, traînéespar de petits chevaux maigres ou par des ânes, descend la côte, suit le tramway jusqu'à la machine de Marly, s'engage sur la grande route, traverse au pas Bougival, Rueil, le Rond-Point-des-Bergères, puis Neuilly, les Champs-Elysées et la rue de Rivoli pour aboutir aux Halles dès trois heures du matin. A. la montée de Neuilly, les maraîchers se croisent ordinairement avec un landau de la Compagnie des PetitesVoitures qui arrive de Paris et dans lequel M. Henri Meilhac après avoir passé sa journée place de la Madeleine et sa soirée à l'Hippodrome, va en villégiature au pavillon Henri IV de une heure du matin jusqu'au moment du déjeuner.En dehors de l'écrivain et des maraîehers, personne ne se risque sur cette route quand il n'y a pas été condamné par la police correctionnelle. Les voleurs eux-mêmes, qui hantaient jadis les environs du MontValérien, les ont abandonnés; la vie n'était plus possible pour eux au milieu de la poussière soulevée par les charrettes et les puanteurs pestilentielles que la brise de la nuit chassait do Nanterre vers ce Paris insatiable qui absorbe tout. .< - -...