Extrait du journal

Mariée très jeune à un haut fonctionnaire qu'elle n'aimait point, elle s'était enfermée dans les stricts devoirs de sa position; elle avait fait avec ellemême le pacte de ne rien laisser apercevoir de cette sensibilité trop vive qui entretenait au fond de son être une agitation permanente, tandis qu'à la surface toutsemblait calme, et reposé. Son éducation, d'ailleurs, l'avait préparée à ce mensonge nécessaire de l'attitude et du geste sans lequel les'consciences humaines, apparaissant dans leur nudité, jetteraient le trouble au milieu de cette scène de la vie où tous les acteurs portent le masque et où il est convenable que les sentiments soient dissimulés autant que les visages. Antoinette de Curzay avait une pudeur morale développée à l'extrême; elle n'avait jamais eu d'amie à qui elle eût consenti des confidences; jamais elle n'avait laissé pénétrer personne dans le sanctuaire secret de son cœur....