Extrait du journal

La date des élections aux conseils généraux et aux con seils d'arrondissement est fixée, on le sait, au 7 octobre. La période électorale sera ouverte officielle ment dimanche prochain. En fait, elle com mencera vendredi par l'exposé que M. Doumergue doit faire du programme de son gouvernement. Bien que les élections cantonales restent soumises à des influences beaucoup plus étroites que les élections législatives, .elles ont une portée politique, qui a été maintes fois signalée. Elles déterminent le penchant de la plupart des cadres du département, • administratifs et politiques. Les élus can tonaux ont souvent une action décisive sur les élections sénatoriales, non seulement par leur vote, mais par l'autorité dont ils jouis sent auprès des maires des communes ru rales qui ont sans cesse besoin de leurs ; services. Par ces mêmes services, ils peu vent aider la politique du député ou, au contraire, lui nuire. Mais il est un autre rôle, peu connu et singulièrement grave, qu'une loi du 15 février 1872 confère aux conseils généraux. C'est, en cas de circonstances exception nelles, de se substituer au Parlement dé faillant ou empêché. Si- les assemblées législatives viennent, dit • la loi, à être illégalement dissoutes ou em pêchées de se réunir, les conseils généraux s'assemblent aussitôt, de leur plein droit et sans convocation spéciale. Ils pourvoient à l'ordre légal et nomment des délégués à une Assemblée nationale qui prendra toutes mesures urgentes. Cette Assemblée natio nale se réunit dans le lieu où se seront ren dus les membres du gouvernement et les députés « qui auront pu se soustraire à la violence ». Pour qu'une telle assemblée siège valablement, il suffit que la moitié des départements, quelle que soit l'impor tance de leur population, y soit représentée. Depuis le 6 février, ce texte oublié a repris une certaine actualité. Notons, en passant, qu'interprété à la lettre, il légali serait une guerre civile si la majorité des deux Chambres déclarait refuser une disso lution qu'on lui imposerait... Les élections cantonales sont donc im portantes, aujourd'hui plus que jamais. 'Mais il ne faut pas se tromper sur la nsEtàre dé" leur -importance. Elles~sont im portantes par le pouvoir de fait qu'elles donneront à certains hommes, groupes et partis, pour s'en servir dans le cadre local et, éventuellement, dans le cadre national. Elles ne sont pas importantes pour fournir des idées, des solutions ou de l'énergie au gouvernement s'il en manque, non plus que pour le faire douter de sa propre action s'il a un plan d'action. Car c'est une plaisanterie de prétendre que l'épicier du village ou le rempailleur de chaises, en votant pour tel ou tel conseil ler d'arrondissement, arbitrera le débat sur la dévaluation entre M. Léon Blum et M. Germain-Martin ou indiquera à M. Chéron le meilleur moyen de faire respecter la justice. Le gouvernement aurait donc tort d'at tendre les élections, cantonales pour se dé cider à faire quelque chose. Car la seule •volonté claire de l'électeur est déjà connue : précisément, que l'on fasse quelque chose ! " Lucien Romier....