PRÉCÉDENT

Le Figaro, 18 janvier 1866

SUIVANT

URL invalide

Le Figaro
18 janvier 1866


Extrait du journal

entendriez crier, sur l'herbe des pelouses, le pied assourdi de la fidélité chancelante, qui se nommera demain la conversion cynique ou l'apostasie effrontée ! Tandis qu'à la Malmaison un grand homme se débat et se cherche dans l'abandon, de son génie et la désertion de ses compagnons d'armes, on danse chez le baron de Feuilles. Le baron, créature gorgée par l'Empereur, est un homme très fort sur la pirouette politique : ses talons sont le thermomètre des causes perdues. En ce moment, il a un pied dans l'émi gration et ùn pied dans la coalition. Il donne un bal à sa mair son de campagne pour célébrer l'abdication du vaincu dfc Waterloo, et les femmes des Iscariotes de l'Empire y fout la chaîne anglaiseavec les brillants ofâciers de Wellington. Sur la terrassé, où arrive par ondées sonores le bruit Wf instruments et des quadrilles, les laquais font des réflexion^ €§ de la philosophie pratique. Us jugent leurs maîtres et ils ju gent la situation. Ce qui les distingue des autres valets qui se trémoussent au salon, c'est qu'ils ont un galon de livrée, à l'habit, au lieu de le porter à la conscience; honnêtes d'ail leurs et respectant au moins le pacte de servitude auquel ils ont souscrit, on ne les voit point recevoir des gages de deux mai sons à la fois et se faire payer également pour servir et pour trahir. " . Les, regards des laquais interrogent tantôt les fenêtres étincelantes de lumières, tantôt le paysage sombre et la villa abandonnée où la fortune del'Empereur fait ses paquets. Leurs lazzis écrivent l'histoire, et quelle histoire ! Eux seuls sont de sang-froid et désintéressés parmi les chancelants, les faibles et les lâches. Eux seuls ont quelque générosité dans l'âmé et mêlent à leurs plaisanteries cyniques une plainte et une larme pour le lion blessé. Les drôles même ont de l'esprit. Lorsque chacun d'eux s'efforce à l'envi de présenter son maî tre comme un gros marchand et un marchand matinal au bazar des consciences, le laquais du baron de Feuilles prend!...

À propos

En 1854, quatorze ans après la disparition du petit journal subversif du temps de Charles X, Hippolyte de Villemessant relance Le Figaro. Paraissant d’abord sous la forme d’une petite feuille de chou littéraire, Le Figaro absorbe L’Événement en 1866 pour devenir, sans transition, le grand quotidien conservateur que l’on connaît. Dès les années 1880, il abandonne la cause du monarchisme pour adhérer aux principes républicains.

En savoir plus
Données de classification
  • richelieu
  • de sancy
  • b. jouvin
  • madrid
  • waterloo
  • wellington
  • france
  • alpes