Extrait du journal
Il paraît qu'il y a, en ce moment, une sorte de petite guerre civile entre' les deux plus grandes villes de France^ Lyon et Marseille, Marseille et Lyon. Je tiens à nommer alternativement chacune d'elles la première, car c'est précisément sur une.question de priorité que la ba taille èst engagée. Lyon a toujours passé, pour être la seconde ville de France, et elle prétend, l'être encore aujourd'hui. Or, Marseille, à son tour, revendique ce titre, et c'est là-dessus que depuis lé der nier recensement la guerre est déclarée.. Il n'y a rien de bien grave encore. Les deux villes; jusqu'ici, n'ont pas marché l'une sur l'autre. Le sang n'a pas été versé, mais l'encre, en revanche, coule à flots. Là polémique des journaux dùre depuis près d'un mois, et elle n'est pas près de finir. Il semblerait cependant qu'en matière de recensement, les chiffres soient les chiffres et qu'il n'y ait rien à faire contre eux^ A ne considérer les choses que sur le papier, on constate-que Marseille a avancé, tandis que Lyon a reculé. II y avait dans cette dernière ville,' il y a quelques années, cinquante ou soixante millehabitantsdéplus qu'aujourd'hui.En revanche, Marseille en avait pinquante ou soixante mille de moins. Or, le dernier recensement a renversé la proportion, et, de ce fait. Marseille se trouverait être maintenant la seconde ville de France, tandis que Lyon passerait au troisième plan. Les Marseillais, naturellement, exultent, mais les Lyonnais ne sont pas contents, et ils s'inscrivent en faux con tre le résultat du recensement. Il paraît que Marseille aurait triché et que son "recensement serait en quelque sorte urt recensement fictif. Ce n'est pas moi qni le dis, je vous prie de le croire. Pour rien au monde, je ne "voudrais v prendre parti dans une querelle aussi délicate, et j'estime que Paris doit rester neutre en cette affaire. Autrement, les deux.villes auraient bientôt fait de se li guer contre lui. Mais il n'est pas interdit de marquer les coups, et il résulte,clai rement de la polémique des journaux que Lyon reproche à Marseille d'avoir mis dans .soi} recensemônt les bouchées doubles. Les Marseillais .ripostent qu'il n'est pas dans leurs habitudes d'exagérer les choses et que, sur ce' point, leur passé répond suffisamment pour eux. Depuis quinze jours, le débat tourne dans ce même cercle, et il paraît malheu reusement insoluble. Ce qui-n'est pas douteux, c'est que les Lyonnais se sont laissé distancer. 'Ils ont des habitudes rangées, méthodiques, régulières, qui les ont desservis dans ce recensement. Ils sont partis de ce principe que deux et deux font quatre et ils ont considéré que l'opération du recensement était une addition, et non: pas une multiplication. Il»paraît qu'à Lyon un grand nombre d'ouvriers et même de petits bourgeois habitent dans les communes de la ban lieue où les logements sont à meilleur marché. Lès communications très faciles et peu coûteuses-leur permettent de venir le matin à leur travail, et de rentrer chez eux le soir pour dîner. Ce sont bien là, au fond, des Lyonnais, dont toutes^ les attaches, tous .les intérêts, et même toute là vie, sont à Lyon. Mais ils sont, cependant, logés dans la banljeue, et le recensement, qui- prend les choses au pied de la lettre, les porte donc comme habitants de la banlieue, ce qui consti tue, tout de suite, pour la ville propre ment dit§, un déchet très sensible....
À propos
En 1854, quatorze ans après la disparition du petit journal subversif du temps de Charles X, Hippolyte de Villemessant relance Le Figaro. Paraissant d’abord sous la forme d’une petite feuille de chou littéraire, Le Figaro absorbe L’Événement en 1866 pour devenir, sans transition, le grand quotidien conservateur que l’on connaît. Dès les années 1880, il abandonne la cause du monarchisme pour adhérer aux principes républicains.
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