Extrait du journal

On bat le rappel là-haut, s'écriait le vieux duc de Dalmatie, chaque fois qu'un de ses contemporains venait à succomber sous les coups du faucheur impitoyable. Hé las! de ces brillants diplomates, de ces êlégantscolonels, dont la jeunesse a brillé d'un si vif éclat au commence ment du dix-neuvième siècle, il ne reste plus que de froides images au sourire glace, au regard immobile, incessamment menacée par le marteau du commissairepriseur. Ainsi donc M. le baron Dudon est mort, il y quelques jours, plein de vie et de jeunesse, car la vieillesse u'est pas autre chose qu'un excès de jeunesse. Il lui manquait quelques années pour avoir atteint cet âge désigné par M. Flourens comme étant le commencement de l'âge mûr : quatre-vingts ans. Homme d'esprit et de courage, issu de cette race qui pousse partout, ainsi que l'a dit et démontré le grand Béarnais, M. Dudon avait conservé la coquetterie.et les raffinements de l'adolescence ; a la vé rité, il ne devançait plus la mode, mais il l'attendait de pied ferme : il avait chevaux, voitures, demeure somp tueuse, table exquise, et le reste. On ne s'aperçut qu'il avait perdu ses dents que lorsqu'il ôta son râtelier pour mourir ; un ami s'étant présenté au moment suprême, le son expirant se couvrit la bouche d'un mouchoir. Ainsi...