Extrait du journal

Le jour où vous avez découvert Etretat, dear sir, c'était un pays sauvage; une seule auberge, celle où vous descendiez, trente baraques de . pêcheurs; le terrain à dix centimes le kilomètre et tout aii plus un vieux coucou dont lés roues grinçaient sur l'essieumal graissé et-qui, traîné par deux maigres haridelles, grimpait .péniblement la côte de Fécamp deux fois par semaine. A votre suite les artistes de Paris se sont précipités vers ce coin normand et en ont fait pendant vingt ans un centre de gaîté; c'était comme une grenouillère d'eau salée, et le Casino des commencements se-trouvait être le pendant du bal des canotiers à Bougival. Les hommes les plus célèbres d'à présent ont, il y a trente ans, dansé le quadrille, vêtus d'une vareuse de marin, coiffés d'un béret rouge et chaussés de sabots, car les jours de pluie on enfonçait jusqu'à la cheville dans les principales rues; l'éclairage n'existait pas à Etretat; chacun était libre de circuler le soir avec une lanterne. Mais que de gaîté véritable dans ces temps primitifs ! Quand du haut de la diligence on apercevait le nid d'artisteç qui semblait se baigner dans la mer, oa poussait un cri de joie, et quand ladite diligence s'arrêtait, dix minutes après, devant le modeste hôtel, cent artistes, réunis pour recevoir les nouveaux, dansaient en rond autour de l'antique véhicule en poussant des hurlements....