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Le Figaro, 29 novembre 1910

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Le Figaro
29 novembre 1910


Extrait du journal

La Rencontre des Astres Alors que l'astronome en sa haute demeure Du fatal avenir lit les instants sacrés, Et, des grands chocs du ciel fixant d'avance l'heure, Sait quels astres un jour doivent se rencontrer; Alors que, résolvant d'immenses théorèmes, Il voit au ciel obscur l'avenir préparé, ' Et suit, comme l'on suit sur la mer des trirèmes, Ces vaisseaux lumineux dans de l'ombre égarés ; . Alors que, froid témoin des célestes désastres, Il peut enregistrer, d'avance découverts, Et les conjonctions formidables'des astres Et les moindres sursauts des moindres univers. i—Dans l'avenir moral, objet de ton délire, O penseur merveilleux, quel que soit ton pouvoir, Un dieu mystérieux te défendant de lire, Des rencontres des cœurs tu ne peux rien prévoir. Ah ! que n'as-tu, pour voir notre avenir sans voile, Pour pressentir .de loin nos chocs- les plus secrets, Quelque ciel où l'esprit remplacerait l'étoile, Où les conjonctions d'âmes s'entreverraient? L'astronome plongé dans l'infini sublime Sait quand deux univers croiseront leurs lueurs; Mais le penseur, debout sur les plus hautes cimes, Ignore quand un cœur doit rencontrer un cœur. Et n'est-ce pas, pourtant, d'immortelles secondes, N'est-ce pas des instants essentiels, dis-moi, . .. Plus beaux que la rencontre inerte de; deux mondes,, Quand deux êtres pensants croisent leur double émoi ? L'étoile va; heurter l'étoile et disparaître; Mais, plus heureux que l'astre aux lumières d'argent, En me heurtant à toi je m'agrandis peut-être, Et quand je crois mourir je deviens plus vivant... Les Voix Tout se tait. Un cœur neuf a pris en moi naissance. Je me sens devenir d une plus pure essence. Quelque chose d'auguste a passé sur mon front. Soyez fiers, mes amis, car nbùs triompherons. J 'Mes1 pas sont libérés'dies liens de ,1a terre. Brusquement, je m'éveille à mon.propre mystère; c Et, n'entendant plus rien des choses d;ici-bas, J'entends parler des voix que je n'entendais pas. ■ Voix dont j'entends en moi la parole qui passe, Depuis combien de temps me parlez-vous, de grâce? Depuis combien de jours me parlez-vous, ô voix ? Je vous entends ce soir pour la première fois, Et pourtant, je devine, à je ne sais quel doute, Que vous avez parlé sans que je vous écoute. Eh qiioi ! depuis toujours me parliez-vous en vain ? Et je n'entendais pas ces vastes sons divins Dont je sens aujourd'hui, — voudrais-je m'en défendre, L'impossibilité de ne plus les entendre-! Et pendant tout ce temps vous avez bien voulu ✓ ' Parler sans exiger qu'ils fussent entendus 1 Sans réponse de moi vouç me parliez encore, Eloquente présence et pourtant qu'on ignore ! ; Et vous parliez toujours, sans repos, sans arrêt, Pour que si, par hasard, un jour, lointain ou près, J'osais, fermant l'oreille au bruit qui vient du monde, En moi-même rentrer une unique seconde Et me considérer sans rien qui me voilât, Vous fussiez sûrement certaines ,d!être. là ! . Et vous m'auriez parlé, sans réponse et sans cesse, Pleines de patiente et divine sagesse, Jusqu'à ce jour fatal qui sera mon dernier, Et, ce jour-là, ainsi qu'on parle au prisonnier, ■ Pour la dernière fois, et d'un accent plus tendre !... '...

À propos

En 1854, quatorze ans après la disparition du petit journal subversif du temps de Charles X, Hippolyte de Villemessant relance Le Figaro. Paraissant d’abord sous la forme d’une petite feuille de chou littéraire, Le Figaro absorbe L’Événement en 1866 pour devenir, sans transition, le grand quotidien conservateur que l’on connaît. Dès les années 1880, il abandonne la cause du monarchisme pour adhérer aux principes républicains.

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