Extrait du journal
Tout à fait mignonne, la nouvelle ma dame X.. , Bijou pour les intimes. Leux de quarante ans, de plus vieux encore, ont connu la charmeuse pécheresse, au temps où elle apprivoisait des serpents dans sa bonbonnière de la rue d Anjou ; mais aucun de ceux-là n'est allé directe ment chez Bijou pour la grande affaire ; «‘Ile avait ce cliché de conversation tou jours prêt : — Mon cher, je vous assure que les ser pents sont des petites bêtes gentilles comme tout. — Les plus repoussantes, voulez-vous dire. Et puis, brrr, c'est froid... — Volts êtes fou, je vous dis que vous êtes fou ! Vous n’avez jamais de votre vie vu un serpent de près. — Non, j'avoue... — Eh bien, tenez, venez donc prendre le thé chez moi, demain soir, je suis sûr que vous changerez d'avis. Et I on allait prendre le thé chez Bijou qui vous montrait deux serpents longs comme le bras, mais vêtue si lég’èremenl, parée si simplement, parfumée avec scs grands et épais cheveux qui lui tombaient jusqu’aux mollets, que le visiteur tombait fasciné, amoureux, soumis, dompté, charmé, tout comme les serpents qu’on remettait bien vile dans leur niche et dont on ne parlait plus. Un bon tiers du Tout-Paris a passé par là. Loinine tant d'autres, Bijou, sur le coup •le quarante ans,a profité de la générosité de son dernier admirateur, un veuf bien l'enté, et tout doucement, elle a mis, dans sa grosse patte de propriétaire sa petite menotte de courtisane, et elle l’y a laissée. Elle a bien fait. M. X... aussi. Depuis six mois, ils font un ménage charmant. Après tout, pourquoi serions-nous plus sévères pour les admirables commerçantes de plaisir, que certains orientaux ne b* sont pour les très légères orientales ? Il est bien certain que n’est pas amoureuse qui veut. La fonction nécessite des charmes ; elle exige un brevet de beauté ou d’esprit. M. X., , un homme très sage, a mis son grand cœur candide sur le cœur lassé de Bijou et l’en a couvert comme d’un pur bouclier. Et voilà pourquoi h* bataillon des K<*penfies possède une recrue de plus. A Paris, on jase ferme, mais on oublie aussi vite qu’on pardonne. Les hommes ne comptent pas dans l'orchestre de la médisance; les femmes sont plus nom breuses pour emboucher les trompes so nores, depuis qu’elles sont si rares à gar der intact leur drapeau de vertu. Sans doute, les dames du Repentir par h* ma riage auront peu de chances de parer les salons de la rive gauche, mais je connais au moins cinquante maisons dont les maîtresses ont la main d’autant plus ou verte qu'elles ont besoin elles-mêmes de la générosité de M. Tmit-ie-Mondi*. D’ailleurs, vous savez sans doute ce mot de madame la marquise de J... — Oui, disait-elle, oui, j’irai, je veux aller chez madame Y... — Je vous en prie, s'écria son mari ; aller dans cette maison, c'est vous com promettre ! — Mon cher, qu’est-ce que c’est que madame V... ? — Tout le pesage d’Auteuil avait, il y a deux ans, accès dans son lit. — Et? — Mais il me semble que cela suffit! — Mon ch«*r ami, vous voyez donc bien que je puis aller chez une femme que les habitués du pesage d’Auteuil fréquen taient, puisque vous m'autorisez à vous accompagner chez plus de dix personnes qui n’ont, au sù ou au soupçon de tous, rien à refuser à leurs gens d écurie. Presque toujours, celle qui fait une fin, ne consent à la retraite que fatiguée de la noce ou envieuse de considération, elles sont de très bonne compagnie, moins oies que la plupart des demoiselles à la fleur d’orange, et surtout beaucoup moins disposées à égratigner le contrat que ces mêmes petits oies. Cocotte avant, cocotte après, qu'im porte!... Il reste souvent quelque chose du passé, une envie de recommencement, (lirezvous ? Mais non, c’est une erreur, ça ne leur dit plus rien. Je connais une foule de...
À propos
Fondé fin 1890 par François Mainguy et René Émery, Le Fin de siècle était un journal mondain bihebdomadaire. Lorsqu’il paraît, il sort immédiatement de la masse en vertu de son style badin et de l’érotisme à peine voilé de ses dessins. En 1893, son « bal Fin de siècle » fait scandale à cause de la tenue très légère de certaines de ses convives. Quelques années plus tard, en 1909, le journal devient Le Nouveau Siècle. Il disparaît en 1910.
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