Extrait du journal

même jeter à la poste voisine un petit bleu pour Bismarck, un homme a tout faire et que j’emploie, en toute sécurité, dans les grandes occasions... « Vers neuf heures, mon aide, le doc teur Hippocrate, qui m’assiste dans mes opérations et administre le chloroforme à mes clients, vint me prendre. Une heure plus tard, nous étions chez ma victime, prêts à commencer. « Elle était étendue, pâle et terrifiée dans un petit lit, au milieu de son sa lon. Elle avait autour d’elle, sa femme de chambre et sa cuisinière. Je voulus savoir s’il n’y avait pas de parents ou d’amis dans l’appartement, ce qui m’eût vivement contrarié et m’eût occasionné une nouvelle dépense d'imagination afin de les écarter. « Personne n’avait été prévenu, j’en fus enchanté. Je consultai ma montre . « Dix heures dix... « C’était trop tôt de cinq minutes... Je bavardai avec mon aide. « A dix heures un quart précis, je le priai d’administrer le chloroforme. « I^a patiente était dans un état con venable d’anesthésie. Je la découvris, j’eus un frisson à la vue de sa gorge abondante et ferme ; je m’apprêtai à faire l’incision de l’abdomen. La femme de chambre, à ce moment, entra, toute bouleversée. « — Il y a, s’écria-t-elle, un homme dans l’escalier qui se meurt : on dit qu’il est empoisonné. Vite, docteur, l’un de vous peut-il venir ?... « —Allez, allez, dis-je à mon aide. Je n’ai pas besoin de vous maintenant. Ici, tout ira bien, sauvez cet homme... « Cet homme, c’était Bismarck qui exécutait ponctuellement mes instruc tions... « Seul maintenant avec ma victime — j’avais défendu aux servantes de péné trer dans le salon — je me croisai les bras, lui insufflai de l'air dans les nari nes, pour l’éveiller. Elle ouvrit les yeux, et d’une voix faible : «v-Eh bien, c’est fini, docteur, de manda-t-elle. f « — Non. criai-je. Rien n’est com mencé... Du reste l’opération est inu...