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Le Français, 24 mai 1871

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Le Français
24 mai 1871


Extrait du journal

VERSAILLES, 23 MAI 1871. La guerre, l’horrible guerre civile fouchïfetifiu à son terme. Le jour est venu où Paris est rendu à la France < son seul souverain », comme le dit M. Thiers, et à chacun de nous qui l’aimons toujours, malgré ses folies, malgré ses crimes. Grâces en soient rendues, après Dieu, à ceux qui nous ont conduits au succès, et dont pas un seul instant,— au milieu des lenteurs, des doutes, des impatiences, — l’énergie patriotique, la fermeté d’âme et la persé vérante activité ne se sont démenties. Aujourd’hui, l’œuvre militaire du Gouvernement est terminée, Bon œuvre civile commence. C’est d’aujourd’hui, c’est de demain plutôt, puisque les dernières flam mes de l’incendie ne sont pas encore tout à fait éteintes, que peut dater la mise à exécution de ce programme de Bordeaux, duquel seul en ce mo ment la France doit attendre le calme, le repos et la réorganisation. Entre le jour où nous sommes et le jour où fut exposé ce programme, bien des ruines, bien des deuils, bien des hontes ont trouvé place. Au point de vue politique , nul changement ne s’est produit. L’insurrection du 18 mars n’a été qu’un immense et sanglant épisode. Le fond de la ques tion est resté le môme. Au moment où éclatait à Paris cette sédition sans pareille dans les fastes de notre histoire, à Bor deaux, les hommes à qui la France, parla voix de ses représentants, confiait ses destinées, entraient à peine au pouvoir. Ils n’avaient pas encore eu le temps d’agir, que déjà l’émeute de la capitale, en les mettant face à face avec des dangers imprévus et d’un ordre nouveau, paralysait leurs intentions et accaparait les forces vives du pays. Depuis lors tout a été suspendu : la machine sociale et politique est restée stationnaire. Il s’agit aujourd’hui de la remettre en mouve ment : mais que l’on s’en souvienne, elle estencorc au point même où l’avaient trouvée il y a trois mois ceux que le pays a chargés de la conduire. L’cflort à faire pour la mener au port exige toujours de tous la même énergie, la même volonté, la même concorde, la même unanimité. A l’œuvre donc, à l’œuvre tous dans une pensée, dans une espérance commune. A Vœuvre, sans hé sitation, sans faiblesse, sans arrière pansée. 11 ne serait pas Français celui qui à l’heure présente ne sacrifierait pas sans regret toutes ses passions, tou tes ses rancunes, toutes ses ambitions personnelles, celui qui se souviendrait qu’il est membre d’un parti avant de se souvenir qu’il est enfant de la France. Il serait l’ennemi de son pays, l’ennemi de la tran quillité et de la liberté publiques, celui qui dans la presse ou dans les assemblées, par la plume ou par la parole dans la vie publique ou dans la vie privée, préférerait ses souvenirs personnels aux espérances de la patrie. Le Gouvernement saura — les paroles qu'a pro noncées hier M. le chef du Pouvoir exécutif nous en sont le plus sûr garant. — le Gouvernement saura, maniant d’une main ferme les armes de la loi et de la justice, assurera tous le calme, la sécurité et l’in dépendance. Il saura faire son devoir en châtiant les coupables, en réparant les ruines, en prévenant les craintes, en écartant enfin, dans les hommes comme dans les choses, tout ce qui pourrait troubler la nation dans sa confiance et dans son activité, et en préparant ainsi les bases sur lesquelles il doit asseoir l’édifice restauré de la grandeur nationale. Que les citoyens, de leur côté, sachent aussi faire leur devoir. Qu’ils soient dévoués, qu’ils soient sin cères, qu’ils soient unis surtout. Qu’ils imitent en un mot le grand exemple d’union et de concorde que leur a donné l'Assemblée nationale. L’unanimité de l’Assemblée à voter les remercie • monts qu’avaient si dignement mérités nos braves soldats de terre et de mer, et l’illustre Chef du Pouvoir exécutif, l’unanimité des applaudissements qui ont accueilli M. Thiers, lorsque, d’une voix émue, il a témoigné de sa gratitude pour cotte no ble récompense bien due à son patriotisme, celte unanimité montre à tous la voie qu'il faut suivre pour ramener au rang qu’elle a perdu la nation qui s’appelait naguère la première du monde. Puisse cette unanimité rencontrer dans le pays entier un écho prolongé ! Puisse-t-elle, au sein de l’Assemblée comme au sein de la France, présager pour l’avenir qui, aujourd’hui seulement semble s’ouvrir devant nous, l’oubli de toutes les préférences et l'union cons tante, intime, inaltérable dans l’action, dans l’effort, dans l’espérance : A ce prix sont notre prospérité, notre liberté, notre résurrection....

À propos

Lancé en 1868, Le Français était un quotidien à la fois catholique et libéral. Tirant à seulement 4 000 exemplaires, son lectorat est toutefois toujours resté très limité. Absorbé par Le Moniteur universel en 1887, le directeur du Français publie néanmoins quelques numéros en indépendant jusqu'en 1898, afin de conserver la propriété du titre.

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