Extrait du journal
Un an, déjà ! Est-ce possible ? C'est plus que possible. C'est vrai. Quelques jours encore, encore quelques-unes de ces courtes étapes, sitôt franchies, entre ces aubes légères et ces vaporeux crépuscules du ciel printanier de Paris, et nous y serons. Ce sera de nouveau la funèbre date, le rappel du jour ef froyable où, sur la grande ville oppressée d'une subite angoisse, s'abattit de tout son poids l'opaque noirceur d'un drap de mort. Tout à l'heure, ouvrant mon journal, j'ai lu ces mots : le terrible anniversaire, le Bazar de la Charité, et cette date : 4 mai... Et ce brusque souvenir me secoua comme une surprise... Je n'y pensais plus. J'avais oublié l'inoubliable. L'empreinte, la si nistre enpreinte si profondément marquée en nos âmes qu'il semblait, à la première heure, que pas un instant elle ne s'en pût effacei, est-elle donc vraiment abolie? Non, car tout de suite je la re trouve, je la sens rouvrant en moi son sillon de sang et de feu. Et c'est, sans effort de mon ima gination, comme par la magique restitution d'un drame machiné et mis ën scène derrière le rideau soudain relevé, l'évocation de la tragique soirée : l'arrivée au journal, entre cinq et six heures, et, dans le bourdonnement familier de la ruche en travail, ce mot jeté on ne sait par qui ni com ment le feu ! Le feu? Où cela? Là-bas, aux Champs-Elysées, dans le quartier de la richesse et de la joie. Mais où encore ? Au bazar de la Charité, dans ce salon Improvisé de la bienfaisance mondaine, où des centaines de femmes nobles, distinguées, élégan tes, jolies, de la beauté et de la bonté en fleur, devaient, justement à cette heure-là, être réunies, comme entassées par leur pieux désir d'être utiles et secourables, par leur ardent, presque fiévreux empressement à faire le bien. Mais alors, ce peut être une catastrophe ?... Et les yeux agrandis se questionnent, et les visages contractés pâlissent. Etc'est,toutd'un coup, l'im périeux désir de partir, d'aller là-bas, pour voir, pour savoir.....
À propos
Lancé par Edmond Tarbé des Sablons et Henri de Pène en 1868, le journal de droite Le Gaulois se définit comme un « journal des informations du matin et moniteur de l’ancien esprit français ». Sans surprise, son lectorat, assez limité, appartient essentiellement à la grande bourgeoisie. En 1929, le journal est absorbé par Le Figaro.
En savoir plus Données de classification - félix faure
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