Extrait du journal
Depuis que M. Glovis Hugues a pris le parti d'occuper ses loisirs d'expulsé en fai sant des improvisations poétiques à la salle des Conférences, ce divertissement est devenu très à la mode. C'est ainsi qu'hier soir, chez le président de la République, on ne savait que faire pour passer le temps. C'est alors que quelqu'un proposa à l'aimable société d'improviser des vers sur un sujet quelconque, Cette motion fut accueillie avec joie, comme étant saine et économique. Le sujet choisi fut : LE CANARD. Après un temps relativement très court, M. Grévy se leva et s'exprima en ces termes : Les gens d'une certaine presse, C'est honteux 1 Me traitent sans délicatesse De gâteux. Ils prétendent, en prose fade Comme en vers Que j'ai l'esprit troublé, malade, A l'envers. C'est une infâme calomnie. Oui, je suis Rêveur c'est le droit du géntfe Je poursuis Une idée et je vais la dire : Si ma cour Me voit quelquefois ne rien dire Tout un jour, Quand je reste auprès de ma femme Absorbé, Je pense au canard de mon âme, A Bébé ! Ces jolis vers ont produit un effet énorme, et c'est sous le coup d'une vive émotion que Mme Grévy a pris ensuite la parole pour faire entendre la courte improvisation que voici : Je n'aime pas le café sans sucre, Et je vous avouerai, pour ma part. Que, si ce n'était par amour du lucre, J'en prendrais très volontiers un canard, La forme un peu lâchée de ce quatrain est rachetée, comme on le voit, par l'ingéniosité du trait. Puis est venu le tour de M. Wilson, qui, après s'être passé la main dans ses blonds cheveux, s'est exprimé comme suit : * Je n'aime pas le canard aux navets, je n'aime pas le canard aux olives. Rôtis ou non je les trouve mauvais, Mon estomac supporte mieux les grives. Après dîner, quand je suis assoiffé, Dans mon fauteuil lorsque je me prélasse, C'est peu pour moi qu'un canard de café : Ce qu'il me faut, c'est une demi-tasse. Mes beaux-parents peuvent fort bien,je croi, A ces canards donner la préférence. Chacun son goût ici bas, mais pour moi, Le vrai canard, c'est la Petite France ! Après de nombreux applaudissements, M. Margue s'est avancé et a commencé d'une voix flutée : Je crains que ma Muse ne perde... On l'a prié poliment de ne pas continuer, vu qu'il y avait des dames. ESCOPETTE...
À propos
Lancé par Edmond Tarbé des Sablons et Henri de Pène en 1868, le journal de droite Le Gaulois se définit comme un « journal des informations du matin et moniteur de l’ancien esprit français ». Sans surprise, son lectorat, assez limité, appartient essentiellement à la grande bourgeoisie. En 1929, le journal est absorbé par Le Figaro.
En savoir plus Données de classification - grévy
- victor hugo
- baronne de ro
- diane de lys
- etranger
- arthur meyer
- jésus-christ
- melchers
- si ma
- ma
- russie
- france
- egypte
- londres
- donnery
- moscou
- jourdain
- paris
- chine
- montmartre
- sénat
- ecole des beaux-arts
- union postale
- ens
- cologne
- la république