Extrait du journal

du Chef de l'Etat Cet ensemble d'émotions collectives et de jugements spontanés qu'on appelle l'opinion publique n'a jamais eu dans les événements politiques un rôle plus important qu'aujourd'hui, mais il semble.; que jamais non plus les gouvernants aient moins songé à capter cette force. On la livre à elle-même on l'abandonne à sa propre masse sans essayeur- d'agir sur sa direction. Je n'affirme pas qu'on pourrait s'en rendre maître et la manier comme une machine, car elle échappe par définition aux influences particulières. Cependant, elle reste capable d'être conduite de haut et utilisée. L'opinion publique, surtout en France, est assez intelligente et finement sensible pour mériter cet effort. Si nous voulions citer un cas où l'opiniori ait été traitée avec une extraordinaire insouciance de sa valeur et disonsle franchement avec un grand sansgène, nous ne trouverions pas mieux que l'accident dont a été victime M. Deselïànel. Un fait de cette importance a été rarement plus mal présenté. Nous ignorons le nom du metteur en scène la république n'a pas à lui adresser ses félicitations, même à l'occasion du 14 juillet. Il était même difficile de discerner, à la façon dont on donnait des nouvelles au public, si la santé, du chef de l'Etat était un drame ou nn vaudeville. Les journaux, renseignés de biais, troublaient leurs lecteurs par des inforinàtions, hasardeuses. Les couloirs de la Chambre étaient traversés de gen^ mystérieux qui lançaient des noms de maladies, tandis que d'autres clignaient les yeux d'un air malin. Le monde politique paraissait agité d'une obscure inquiétude, mélangée ça et là d'un rien de scepticisme. Quant à l'entourage de M. Deschanel, il ne s'est point signalé, dans toute cette affaire, par une habileté au-dessus de la moyenne. Bref, d'un peu partout, on a joué de la santé de M. Desc-hanel avec une certaine légèreté. Je ne parlé pas de la note d'hier et des démentis d'aujourd'hui parce qu'ils dépassent l'incohérence permise. La moralité) de c'est que la l;iépublique devrait bien prendre. l'habitude de respecter son premier magistrat. Car un régime est représenté, devant le monde, par des chefs, et non' par une foule anonyme c'est une doctrine dont on ne sortira pas....