Extrait du journal

Celle que le populaire, en son yivant, appelait « la fille au grand cœur » avait assurément sa place assignée dès l'origine dans une collection consacrée aux « grands coeurs». Les .collections, soïit à la mode nos romanciers ne travaillent pas encore en série, mais, pour les historiens et les biographes, c'est déjà fait. Et cette mode nouvelle ne va pas sans d'assez grands avantages et sans deux ou trois petits inconvénients aussi quelquefois, dont le plus sensible, qui lui est commun avec le lit de Procuste, est d'obliger les auteurs à de terribles compressions ou à des amputations plus douloureuses encore. Mais tel est le souple et plastique génie de Marie Gasquet qu'il ne semble pas que sa Jeanne ait le moins du monde souffert d'un régime préjudiciable à tant d'autres écrivains de complexion moins rétractile. Sans doute Mme Gasquet pàsse-t-elle assez rapidement sur les premières années, même sur l'action militaire de Jeanne on dirait que toute cette vie de la Pucelle jusqu'à son procès de condamnation n'est pour 611e qllun préambule, un acheminement à la seule affaire essentielle qui est ce procès. Et comme elle a raison Que saurions-nous de Jeanne sans lui ? Nous ne le saurions en tout cas que de seconde main, tandis qu'ici c'est sa propre parole que nous entendons, c'est elle en personne qui déroule au cours de son interrogatoire la trame fleuri de sa rustique enfance à Vaucouleurs, c'est sa pensée la plus s,ecrète, ses colloques avec le divin, le mystère même de sa charité, pour parler comme Péguy, qu'elle nous propose en vérité oui, nous possédons bien là l'évangile de notre délivrance....