Extrait du journal

Vous l'avez croisé dix fois, au dernier mois d'octobre, le splendide équipage de la comtesse de B. Tous les acoquinés du Bois le connaissaient, le dorsay battant. neuf, attelé de deux pur-sang magni&ques, conduit par le plus exemp)aire des cochers. Je le vois encore, ce cocher il avait acquis autour du lac une véritable célébrité pour sa correction arrogante. Aujourd'hui que les Parisiens de haute élégance prennent à tânhe d'imiter les grossiers, lourds et roides palefreniers angtais, on arrive à ne plus savoir ce qui distingue les maîtres des domestiqueset c'est, comme dirait Prud'homme, un signe des temps. Mais peu importe! Souvent le dorsay était vide. L'attelage, ces jours-là, promenait superbement jes armoiries étrangères et la couronne comtale qui brillaient sur les panneaux. Mais aussi quelquefois, sur les coussins moelleux, renversée plutôt qu'assise, une jeune femme apparaissait. Et quelle apparition c'était que son rapide passage! Quel charme prodigieux dans sa nonchalance I Quel rayonnement de grâce et de séduction elle dégageait autour d'elle Les femmes se retournaient et séchaient de jalousie. Les cavaliers lui faisaient escorte. Elle s'éteignait dans la poussière des admirations qu'elle soulevait. Ce n'était pas une reine; c'était une fée. C'était mieux qu'une fée, c'était la plus ensorcelante des Parisiennes, la comtesse de B. et l'on ne savait rien sur elle, sinon qu'elle avait pour mari un gentilhomme étranger fort sauvage et qu'elle ne devait qu'à sa provocante beauté sa nouvelle <:t foudroyante fortune....