Extrait du journal

Hier soir, lorsque la fatale nouvelle de la mort du maréchal Poch se fut répandue sur les grands boulevards, dans les' quartiers du centre, et se fut propagée jusque dans les faubourgs populeux, une émotion subite élreignit tous les cœurs, s'imprima sur tous les visages. Paris, sous le coup qui atteignait la France, se retrouvait lui-même. Les éditions des journaux du soir, aussitôt tirées, criées, étaient littérale ment enlevées aux vendeurs. Aux em bouchures des stations du Métro et du Nord-Sud, des groupes se formaient, spontanément, commentant le tragique événement, pressenti cependant par beaucoup, mais qui endeuillait la soirée d'une ombre dont chacun eût voulu écarter la présence et la nier... Hélas !... Dans les yeux de ceux qui avaient fait la guerre, que de larmes nous avons surprises ! L'annonce du trépas du vainqueur de la grande guerre parvint à la connais sance de tous précisément à l'heure où la foule laborieuse de la capitale s'é chappe des-ateliers et des bureaux. Quoi que la multiplication des communiqués et la fréquence des précisions alarman tes; eussent depuis de longs jours laissé redouter l'imminence d'une issue fatale, la consultation d'avant-hier, un peu moins pessimiste, avait laissé percer un léger espoir. La stupéfaction et la dou leur. patriotiques furent donc d'autant plus considérables. Dans les grands restaurants pourvus d'orchestres les musiciens se turent dès que les exécutants eurent été. nïis au courant du décès. Les repas furent, pour la plupart, abrégés, et un de nos amis nous exprimait la sensation de triste fierté qu'il avait éprouvée en constatant...