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Le Gaulois, 24 mars 1924

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Le Gaulois
24 mars 1924


Extrait du journal

Une petite-fille qui s'exalte sous la main de Gœthe, une adolescente qui fait une scène pour voir Chateaubriand, c'est la promesse d'une belle sensibilité. Marie de Flavigny devait dépasser toutes les promesses lyriques. Le 16 mai 1827, à vingt-deux ans, elle épousait à la Madeleine le comte d'Agoult'qui avait vingt ans de plus qu'elle, des habitudes dp cercle et un; bel égoïsme. Elle nourrit quelques années la solitude de son cœur avec des succès mondains dans ia société de la Restauration et de la monarchie de Juillet. Puis la passion l'abattit de. sa foudre. Le jeune Listz commençait d'éblouir. Parie en posant sur les touches d'ivoire ses longues mains nerveuses qui détenaient et lâchaient comme des ciseaux les désirs, les rêves, les ^enchantements. Une beauté alanguie qui dissimulait chez un si jeune homme l'impérieuse volonté, la divulgation. d'un amour trop précoce et malheureux, l'interprétation unique des dernières sonates de Beethoven jusqu'alors interdites aux virtuoses, une éloquence naturelle qui donnait un tour séduisant aux conversations embrouillées des saint-sirnoniens, c'était de- quoi le signaler il la sympathie d'une* jeune femme qui" respirait les émotions d'art comme son atmosphère naturelle, et qui déjà passait pour mépriser un monde auquel elle se sentait supérieure. Elle abandonna pour lui son mari il qui elle ne tenait guère, son nom et ses succès à quoi elle tenait beaucoup, et sa fille qu'elle adorait. Qu'on imagine le scandale de leur amour et de leur fuite, quand il leur était si facile de cacher à Paris leur liaison, comme tant' d'autres Mais tandis que l'une se précipitait hors de la société avec cette joie du martyr qui s'immola, l'autre voyait sa renommée grandir de toute l'importance de sa bonne fortune. Il bénéficiait de ce qu'elle perdait. Le rang qu'elle occupait, sa beauté de sphinx, le prestige qui l'entourait allaient devenir les accessoires de iv planiste er rant pour qui tes applaudissements du public auraient toujours plus de charme que la solitude la plus exaltée....

À propos

Lancé par Edmond Tarbé des Sablons et Henri de Pène en 1868, le journal de droite Le Gaulois se définit comme un « journal des informations du matin et moniteur de l’ancien esprit français ». Sans surprise, son lectorat, assez limité, appartient essentiellement à la grande bourgeoisie. En 1929, le journal est absorbé par Le Figaro.

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