Extrait du journal

Venise cst-olle ce qu'elle était avant la guerre ? Y trouve -t-on toujours cette nonchalante et gracieuse facilité de vie ? Est-ce encore le lieu du! monde où l'on peut oublier le reste du monde et y savoure-t-ori cette atmosphère de vacances, de repos, de répit, par laquelle, jadis, on se laissait enivrer complaisamment Hélas y a-t-il un pays, un endroit, en 'Europe, où la, charmante (et peut-être coupable) insouciance d'avantguerre soit encore possible? Venise, sauvée, a peine touchée 'matériellement par morales de ses épreuves et de ses inquiétudes. Pendant bien des. mois de lourdes ombres ont pesé sur elle. Et il ne s'ig!.t pas ici d'une' expression figurée.; Avec quelques camarades, en 1917, j'eus l'oc.•asion de quitter un moment le front italien, et de descendre jusqu'à la lagune. La seule nuit que je passai alors à Venise me gonfla le coeur de mélancolie. Vous connaissez la gentille animation des soirées vénitiennes. Vous revoyez cette ̃nicrceri.a. bordée par cent boutiques étroites et peu profondes, pareilles a des armoires ouvertes et encombrées et, devant ces étalages pressés et brillants, la foule, qui jase, et qui, dans ce couloir si restreint,- ne se heure, ne se bouscule jamais....