Extrait du journal

Mais au fond, tout cela ne mérite pas une étude approfondie. Nos sculpteurs ont plus de mérite en eux que n'en décèlent teurs envois de cette année, et l'on ne pourrait étudier équitablement sur de tels échantillons la tournure de leur talent et la crise qu'ils traversent car la statuaire traverse une crise qu'il sera bientôt indispensable d'analyser. Plusieurs s'estiment tenus d'inventer un art tout moderne, et ils font des essais de figures à costumes, pifferari ou paysannes en haillons, sans ampleur ni grandeur. D'autres s'adressent aux traditions de la Renaissance. Presque tous se sont dépaysés et ne savent que faire. Mais la sculpture est un art d'essence plutôt que de pittoresque. Elle vit par les lignes et non par la couleur, et ce n'est pas en prodiguant les accessoires et en multipliant les eS'ets de clair-obscur qu'on la modernisera. Ceux-là, sans mentir, la serviront le mieux qui s'appliqueront à rendre le corps humain le plus simplement et le plus strictement, dans la franchise de ses allures et l'harmonie de ses mouvements. Le pire défaut de nos sculpteurs est de forfaire à la simplicité. Ils veulent exprimer trop de sentiments et de nuances de sentiments ils arrivent au galimatias par la curiosité. Par là même, ils tombent dans les errements du seizième siècle, ce siècle tourmenté dont les œuvres, à force d'être subtiles, se faisaient vagues à plaisir....