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Le Gaulois, 26 avril 1898

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Le Gaulois
26 avril 1898


Extrait du journal

Nous donnons aux Américains « de quoi que nous avons », c'est-à-dire la fleur d'art et de fan taisie qui pousse sur notre vieux sol tourmenté et retourné par vingt siècles de civilisation. Quand il a eu gagné beaucoup d'argent à vendre du cochon salé et du pétrole, le négociant de New-York ou de Chicago s'est avisé qu'il n'y avait pas de raison absolue pour qu'il employât la totalité de cet argent à augmenter d'autant son * commerce de pétrole et de cochon salé. Et quand, d'aventure, il est mort sans avoir fait cette ré flexion, il a laissé derrière lui des filles ou des fils qui se sont chargés de la faire. Après s'être largement assuré le moyen de vivre, l'Américain a pensé à s'assurer le moyen de ne pas mourir d'ennui. Sa première ressource contre le spleen a été le voyage. Il est venu chez nous, s'est frotté à nos mœurs, a visité nos musées et nos théâtres, s'est complu dans l'élégance affinée de nos salons et de nos boudoirs. Il a senti le charme dont s'im prègne l'atmosphère intime du « home », quand une main délicate en harmonise l'arrangement. Il a savouré la sensation que procure à l'œil un joli tableau jflacé sous son vrai jour, un meuble de prix discrètement mis en valeur dans l'enca drement de deux tentures, un bibelot dont l'ar chaïsme ou l'exotisme évoque la poésie de la dis tance ou du passé. Il s'est délecté à entendre la voix de nos chanteurs et à écouter la diction de nos comédiens... Et, tout ce dont il s'était régalé chez nous, il a voulu l'avoir chez lui. Pour les tableaux, ça allait tout seul. Il n'y avait qu'à les disputer à prix d'or aux amateurs de France. A ce compte-là, l'issue du combat n'était pas douteuse. Ce fut, au profit de l'Améri que, fine rafle de notre peinture, jusqu'au jour où le bill Mac-Kinley sema l'alarme de la rue de Rome à l'avenue de Villiers. Mais, quelques droits de plus à payer ne sont pas pour refroidir des clients sérieux. Après, comme avant le bill, la bonne peinture de France continue à émigrer èn Amérique où les toiles signées Madeleine Lemaire, Béraud et Yibert n'ont pas encore acca paré tous les murs. Et les bons Yankees conti nuent à en fourrer partout, jusque dans les bars où les nymphes de Bouguereau voient couler des flots qui n'ont rien de commun avec ceux de l'Hip pocrène....

À propos

Lancé par Edmond Tarbé des Sablons et Henri de Pène en 1868, le journal de droite Le Gaulois se définit comme un « journal des informations du matin et moniteur de l’ancien esprit français ». Sans surprise, son lectorat, assez limité, appartient essentiellement à la grande bourgeoisie. En 1929, le journal est absorbé par Le Figaro.

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