Extrait du journal

Si je rapproche à dessein ces dates, c'est pour fai're comprendre dans quelle situation vraiment délicate se trouvait à Berlin notre mission officielle et, avec elle, les Français de passage qui allaient assister à des fêtes où leur présence rappelait le récent souvenir d'un accident qui aurait pu être fatal à un souverain en visite dans leur pays, en même temps qu'elle soulignait les difficultés réelles, mais .cependant exagérées, d'une lutte diplomatique où il nous plut de laisser à l'adversaire une trop facile victoire. Les ordres les plus précis et les plus sévères avaient été donnés aux membres de notre mission à l'égard des journalistes aucuoe conversation, bien mieux, pas même de contact, ne recevoir aucun indiscret, et si le hasard amenait une rencontre, ne pas hésiter à marquer une indifférence strictement correcte telle était la consigne. Elle fut admirablement observée, et je ne puis me rappeler sans sourire les fuites éperdues du général à travers les couloirs de l'hôtel dès que l'envoyé de quelque journal de Paris lui était signalée, la raideur glacée de l'amiral rendant les saluts des journalistes en quête d'impressions, l'embarras enfin de notre attaché militaire, le colonel de La Guiche, un jour que je le rencontrai dans l'ascenseur. Il allait au quatrième, mais fit arrêter la machine dès l'entresol et préféra monter à pied plutôt que de subir le voisinage compromettant d'un rédacteur du Ga~oM. Seul le ministre M. Arago, gracieux autant que diplomate, prodiguait les confidences et accumulait les détails, les uns et les autres n'ayant trait d'ailleurs qu'à des circonstances historiques sans portée actuelle. De tout cela je n'avais cure, car j'avais le sentiment très net d'être renseigné au mieux et de ne pouvoir cependant faire œuvre professionnelle de mes impressions, si exactes fussent-elles. Voicipourquoi....