Extrait du journal
Un .jour, dans un petit village du département de l'Ain, où j'étais en visite, je vis au milieu d'un Mot de verdure, au centre d'une corbeille de fleurs, une villa très blanche dont les murs semblaient pétiller au soleil. <( Qui donc habite ce paradis terrestre?)) demandai-je .à mon compagnon. Il me répondit K C'est la veuve d'un notaire, fort honnête homms, mort U y a nombre d'années. Si vous alliez au cimetière, vous y verriez sa tombe Éternellement fleurie. La femme est verte et droite, encore que vieille. Elle cultive elle-même ses rosés avec une sorte de passion, pour en orner chaque jour la lourde pierre sous laquelle dort son mari. On ne sait d'elle que peu de choses. Le modeste et digne garçon qui l'épousa l'avait connue à Paris, tandis qu'il faisait ses études, et plus tard il s'était uni à elle sans rien dire a personne et il la ramena. Il paraît qu'elle a été danseuse à l'Opéra et d'un talent plein de promesses. Un soir, si j'en crois de vagues légendes, elle se serait cassé la jambe et puis elle aurait renoncé a son art. Jamais, jamais elle ne parle du passé. E!Ie est douce, charitable, et elle vit retirée au possible. Tenez, justement, la voila.)) J'aperçus en effet à ce moment une forme de femme en capeline blanche, qui se dirigeait vers un massif de rosiers. Elle avait la taille encore Sne et la tournure presque jeune, se démenant, très vive, le sécateur & !a main, au cœur d'un ~rai fouillis de rosés pourpres mêlées de rosés jaunes. Malheureusement, je ne vis point sa figure. Une naturelle curiosité me poussait vers cette créature au destin bizarre, cette étoile inconnue qui avait brillé au ciel de l'Opéra et qui venait s'éteindre là, parmi les fleurs, en cette lointaine bourgade. Je la considérai longtemps sans qu'elle se doutât qu'on l'observait. D'ailleurs, il ne me fut pas donné de l'approcher et de causer avec elle. Huit jours plus tard, j'avais quitté la contrée et je ne pensais plus à ma vision d'une heure....
À propos
Lancé par Edmond Tarbé des Sablons et Henri de Pène en 1868, le journal de droite Le Gaulois se définit comme un « journal des informations du matin et moniteur de l’ancien esprit français ». Sans surprise, son lectorat, assez limité, appartient essentiellement à la grande bourgeoisie. En 1929, le journal est absorbé par Le Figaro.
En savoir plus Données de classification - félix faure
- chenest
- roi de grèce
- bertrand
- lenfant
- napoléon
- delyanni
- brard
- j. renais
- mollard
- paris
- france
- londres
- angleterre
- bretagne
- montmartre
- plancoët
- washington
- langres
- havre
- la république
- armée russe
- maison du peuple
- ecole polytechnique
- parlement
- union postale
- armée française
- nts