Extrait du journal
PARIS, 3 DECEMBRE. Il se passe, de Vautre côté du détroit, quelque chose d’effronté ment ridicule, qui soulève l’indignation. Que signifient ces bulle tins de la cour de M. le duc de Bordeaux, dont les journaux car listes se font les paisibles échos en France? Comment sommes-nous condamnés à lire ces programmes de restauration, dont la Quoti dienne et scs satellites fatiguent le dédain public? C’est trop de jactance et trop d'impunité 1 Les tombes où le peuple de juillet avait couché l’émigration et l’ancien régime sont elles donc si mal scellées, que ces deux fantômes puissent relever leurs têtes, même pour un seul instant? Nous sommes fâchés de le dire ; mais ces ré veils d’une faction vaincue , cette irrévocable défaite qui s’agite et se redresse, ces ombres qui gesticulent et qui parlent, ont jeté dans la conscience publique des germes de colère et de mépris dont il est temps de tenir compte. Encore, s’il n’y avait là que des hommes d’une autre génération! Si Von y voyait seulement ceux qui ont reculé devant la grande date de 1830, et qui se sont réfugiés dans une protestation silencieuse ou généreusement permise! Nous concevons, jusqu’à un certain point, la conduite, les démarches, les actes de MM. de Levis, de Chàteaubriand, de Fitz-James; mais, au sujet de quelques autres, il ne saurait en être de même. La fidélité, oui! le parjure, non! Il prend fantaisie à M. de Fitz-James de saluer, à Londres, M. le duc de Bordeaux comme roi de France. A lui permis, puisque telle est aujourd’hui la tolérance de nos mœurs, et puisque telles sont les mollesses de nos magnanimité»! M. le duc de Fitz-James, après avoir débité ses bravades, repassera la mer et reviendra vivre, li bre et tranquille, dans le pays dont il nie le gouvernement et re pousse les institutions. On trouve cela tout simple; nous le vôulons pien. Mais ce que nous ne comprenons pas, ce que nous ne com prendrons jamais, c’est que des membres mêmes de la chambre des députés, des membres de la représentation nationale, aient ac cepté un rôle dans cette insolente comédie. N'ont-ils pus, à la face du pays, prêté serment de fidélité au roi des Français? Ils Vont Prêté, ce serment! nous les avons vus et entendus, debout, dans assemblée des représentans du pays, lever la main et jurer fidélité à Louis-Philippe, roi des Français! Ce serment, ils Vont prononcé devant Dieu et devant les hommes ! ils Vont prononcé la voix haute et à visage découvert... Cependant les voici à Londres qui jurent un autre serment à M. le duc de Bordeaux ! les voici qui repous sent du pied le mandat dfe leurs commettans! les voici qui disent, avec M. le duc de Fitz-James, à M. ,le duc de Bordeaux : Nous ve nons saluer en vous LE ROI I)E FRANCE ! les voici qui assis tent à des conférences dans lesquelles on délibère sur les moyens d'effectuer une nouvelle restauration ! De leurs misérables déguisemens, lequel est le faux? de leurs mensonges, lequel est le plus lâche ? de leurs cynismes, lequel est le plus effronté ? de leurs ser mons, de leurs parjures, lequel est sincère? Nous avons, en vérité, une profonde pitié de ce jeune prince qu’on traîne dans de telles voies ! Le voyez-vous tristement entou ré de ces fidélités à deux fronts? A qui se fierait-il, parmi ces cœurs si loyaux? Comment croirait-il qu’aucun d’eux ne le joue, ne le trompe et ne le perd ? Pour garantie des sermens du jour, on lui fait valoir les parjures de la veille ! On accourt à Londres ; mais il se souvient de Paris ! On lui parle d’un trône ; mais il n’ignore pas à quelles conditions on monte à cette tribune où MM. Berryer et de Valmy ont eu l’honneur de parler. Voilà donc de grands courages qui s’en vont vaillamment com mettre au dehors"ce qu’ils n’oseraient parmi nous rêver, dans leur plus profond sommeil ! Avocats de causes royales, en toute sûreté...
À propos
Le Globe était un quotidien guizotiste dirigé par Adolphe Granier de Cassagnac, partisan d’une monarchie tempérée par une Constitution et deux chambres. Journal politique défenseur de la Monarchie de Juillet et du suffrage censitaire, il fut publié de 1837 jusqu’à 1845. Cette tribune politique orléaniste sombra peu avant la chute de Guizot, trois ans avant la Révolution de 1848 et la fin de la Monarchie en France.
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