Extrait du journal

Parle, 3 novembre. Nous demandons si dans un pays où l’on fait de l’opposition avec des espingoles, il est possible de faire du gouvernement avec une constitution libérale1? Là où l’on attaque par l’assassi nat, comment ne pas se défendre par la justice? Là où est l’anar chie, comment éviter l’arbitraire? Les gouvernemens ne sont que des moyens d’atteindre un but. Le premier but d’un gou vernement, c’est de faire vivre le peuple qu’il dirige; le second, c’est de le rendre libre. Mais s’il doit périr par la liberté, il faut voiler en gémissant la statue de la déesse. Ne reprochait-on pas au ministère espagnol d’avoir déchiré les feuilles libérales de la constitution de 1837? Le Journal des Débats, lui-même, tout sincèrement conservateur qu’il est, ne taxait-il pas de tentative ré trograde la réforme de la constitution? Eh bien ! celte constitution, toute rétrograde quelle paraissait être, sera peut-être encore trop libérale pour pouvoir répondre aux exigences de la situation. Vous parliez de respect de la liberté individuelle, de jugement par le jury 1 Sous prétexte de respecter la liberté individuelle, on res pecterait la liberté des conspirations ; sous prétexte de mettre la lersonne des citoyens sous la sauvegarde du jury, on offrirait a chance de l’impunité à l’assassinat politique. 11 vaut mieux, pour un gouvernement, abdiquer que de rester impuissant et désarmé. Avant de constituer la liberté, il faut fonder l’ordre. C’est là la mission du gouvernement actuel de l'Espagne. CeUe mission, il ne l’usurpe pas ; les cortès la lui donnent, et la preuve qu’elles la lui donnent librement, c’est que la minorité, toute faible qu’elle soit, proclajme sans hésiter son dissenti ment. Le gouvernement espagnol peut être certain que les radicaux n'y mettraient pas tant de façons, et qu’ils ne se donneraient pas la peine de faire de l’arbitraire constitutionnel. Ils ne de manderaient pas aux cortès de reviser la constitution ; ils trouve raient beaucoup plus simple de la violer. La conspiration de Madrid et de Barcelone met les radicaux de Paris dans une grande perplexité. Pour jeter de l’odieux sur le gouvernement espagnol, ils viennent dire que la double tentative d'assassinat sur le général Narvacz à Madrid, sur le baron de Mccr à Barcelone, est uno fable atroce [Nathonàl de ce matin). Mais ils avaient annoncé que le peuple espagnol ne permettrait pas qu’on attentât à la constitution sacrée de 1837. D’Un côté, la conspiration aurait pu passer assez convenablement uuur un soulèvement du peuple espagnol ; d’un autre côté, la fable atroce est d’un merveilleux effet contre le ministère-Narvaez. Pour sortir d’embarras, le National ajourne le soulèvement du peuple espagnol. L'Espagne entière, dit-il, est fatiguée de tant de troubles et de convulsions; il faudra qu'on la pousse à bout pour quelle se soulève de nouveau; et il fait entendre que les espingoles qui devaient frapper le général Narvacz étaient des uspi ngoles de théâtre, que les balles étaient des ballesde carton, que les cinq cents bonnets rouges qui onlentouré le baron de Mec r vou laient tout simplement lui donner une sérénade ; enfin, que c’est une affaire qui paraîtra à distance grosse de ridicule, mais qui est en Espagne grosse de violence et de persécutions. Les rédacteurs du National, qui sont gens d’esprit et qui ont effeuillé le chêne de Guemica, auraient dû s'apercevoir depuis quelque temps que leur correspondant de Madrid leur fabrique une Espagne fantastique. Il leur a d’abord fait croire que l’Es pagne allait se soulever pqyr U réforme de la.constitution. L’Es...